Hiro’a n°190 – Trésor de Polynésie

Trésor de Polynésie – Direction de la culture et du patrimoine (DCP) – Te Papa hiro΄a ΄e Faufa΄a tumu

Pouvāna΄a a ΄Ō΄opa : son buste en voie d’être classé

Rencontre avec Vincent Marolleau, archéologue à la Direction de la culture et du patrimoine. Texte : Delphine Barrais – Photos : Vincent Marolleau

La liste des sites et monuments classés de Polynésie française évolue. Elle devrait accueillir sous peu un nouveau venu, à savoir le monument dénommé buste de Pouvāna΄a a ΄Ō΄opa. Celui-ci se trouve place Tarahoi à Papeete. Il compte parmi les priorités à intégrer.

Sollicitée par la vice-présidence en août en vue de l’intégration du buste de Pouvāna΄a a ΄Ō΄opa à la liste des monuments classés, et répondant à sa mission de conservation, la Direction de la culture et du patrimoine a aussitôt effectué un bilan sanitaire de la sculpture et rédigé un rapport contenant état des lieux et préconisations. Le buste est une sculpture qui représente le metua. Originaire de Huahine, Pouvāna΄a a ΄Ō΄opa Tetuaapua est né en 1895. Décédé en 1977, il fut le chef de file du Rassemblement des populations tahitiennes et considéré comme le fondateur de la classe politique tahitienne moderne. L’œuvre, elle, est signée Georges Oudot, elle a été inaugurée le 10 mai 1982, jour anniversaire du metua. Originaire de la ville de Chaumont en France, Georges Oudot (1928-2004) a réalisé de ombreuses sculptures et des peintures de personnalités (Pierre Mendès France, Edgar Faure, Juliette Gréco, madame Pompidou…). Ses œuvres sont exposées dans une vingtaine de musées en France. Il est l’un des représentants de la sculpture figurative contemporaine française et a reçu de nombreuses distinctions comme le prix Fénéon de sculpture, le prix national des Arts, le prix de la Jeune Sculpture, le prix Modigliani de dessin, le prix Biennale de sculpture… À Tahiti, il a également réalisé « Tahiti, entre mer et nuages » qui est restée de très nombreuses années dans la cour du lycée du Taaone à Pirae.

Tout un symbole

Vincent Marolleau, archéologue, a dressé le bilan sanitaire du buste, « une œuvre d’art qu’il convient de classer au titre des monuments historiques ». Elle est faite de béton et n’est donc pas de matériaux et ressources précieux. « Mais c’est bien le symbole qu’il représente qui compte. » L’archéologue, dans son rapport précise que « la personnalité, le charisme et son amour du peuple ne peuvent que corroborer la demande de classement ».  Le monument est un incontournable de la place Tarahoi. Il est posé sur un socle en béton, soutenu par deux colonnes de 4 mètres de hauteur. Le piédestal supportant le monument est un bloc massif quadrangulaire aménagé en pyramide à gradins (emmarchement à trois niveaux). Les trois gradins, en partant du niveau du sol, présentent une hauteur respective de 25, 30 et 45 cm. Le piédestal est ainsi élevé d’une hauteur maximale d’un mètre. Vue en plan, il présente une forme rectangulaire de 4 mètres de longueur pour 3,25 mètres de largeur. Le premier gradin mesure 4 mètres de longueur pour 3,25 mètres de largeur. Le deuxième 2,9 mètres pour 2,15 mètres de largeur et le troisième et dernier gradin : 2,2 mètres de longueur pour 1,6 mètre de large. Les deux premiers gradins sont en effet parementés d’un pavage et d’un revêtement en galet de plage Deux plaques commémoratives relatant la vie Pouvāna΄a a ΄Ō΄opa, l’une à gauche en reo tahiti et l’autre à droite en français, sont fixées sur des blocs installés sur le premier gradin à l’avant du monument.Les deux blocs sont tous deux d’une hauteur maximale de 0,95 mètre pour une longueur de 1,5 mètre, l’épaisseur est de 0,30 mètre. Les plaques en granit sont jointes aux blocs par quatre rivets. Les écritures, blanches, ne portent aucun vestige ou trace d’une quelconque polychromie ou d’un revêtement doré.

Constats et préconisations :

La surface à classer représentera 16 mètres carrés. Un périmètre de protection de 10 m.tres de rayon est suggéré, de même que le plantage d’une haie pour atténuer les effets de la pollution. La reconstruction du muret et l’installation d’un cordon de sécurité pour éviter aux visiteurs de monter permettront de préserver le monument. 

« C’est un endroit de passage et de rassemblement la nuit comme le jour. Les gens y ont leurs habitudes », a pu constater Vincent Marolleau, « Il faudra donc entamer un dialogue » . Il propose également d’implanter une signalisation pour sensibiliser et rappeler la réglementation. Il suggère, en plus, d’ajouter une frise chronologique ainsi que des éléments de contexte sur la vie du metua et sur la vie politique locale. La statue est en bon état, malgré le passage incessant des voitures et son exposition. Elle est en plein air et ne dispose, aujourd’hui, d’aucune protection. Toutefois, Vincent Marolleau préconise un soigneux nettoyage. « Il faudrait aussi refaire le revêtement. » Cela ne demandera pas d’expertise particulière. « Pour autant, nous travaillons avec des artisans de restauration du  patrimoine historique qui sont en mesure d’intervenir sur ce genre d’opération. » Les sites et monuments, une fois class.s, sont protégés. En cas de dommage, des amendes de 5e catégorie et peines de prison sont prévues pour les auteurs des méfaits. Ainsi, l’auteur des atteintes au marae de Nu’urua, à Mo’orea, avait-il été condamné par la justice en 2015.

Il existe un peu plus de 200 sites et monuments classés en Polynésie, mais ce chiffre est amené à changer rapidement. « Une mise à jour de la liste est indispensable », affirme l’archéologue Vincent Marolleau. Pour ce qui est du buste de Pouvāna΄a a ΄Ō΄opa sculpté par Georges Oudot, le rapport de la Direction de la culture et du patrimoine doit être présenté à la commission des monuments historiques début octobre. Si elle est favorable au classement, il sera prononcé et acté en conseil des ministres. ◆

Lég

Le buste de Pouvāna΄a a ΄Ō΄opa est posé sur un socle en béton, soutenu par deux colonnes de 4 mètres de hauteur.

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