Hiro’a n°182 – Trésors de Polynésie
Trésors de Polynésie – Service du patrimoine archivistique et audiovisuel (SPAA) – Te Piha faufa ΄a tupuna
DestinationTahiti à l’affiche
Rencontre avec Hiriata Millaud, cheffe du Service du patrimoine archivistique et audiovisuel – Fonds Danielsson
Le « fonds Danielsson » de la bibliothèque du SPAA, réunit une grande quantité de coupures de journaux et de revues, rassemblées par thème. Parmi ces archives, des publicités de compagnies aériennes en anglais datant des années 1970. Leur point commun : elles mettent en avant la destination Tahiti.
« Si vous avez besoin d’une grande dose de douceur de vivre, comme la plupart d’entre nous, alors vous êtes prêt pour le Pacifique Sud. C’est là que tout a commencé. Sinon, pourquoi le qualifierait-on de paradis polynésien ? Polynesian Paradise est le nom de l’un des six circuits du Pacifique Sud dont le prix est de 965 $. Vous visiterez des endroits tels que les Samoa américaines et occidentales, les Fidji, les Tonga et Tahiti. […] »
Cet argumentaire, c’est celui de la compagnie aérienne internationale Pan Am paru dans Pan Am Clipper Magazine, en mai 1973. La compagnie y vante ses circuits dans le Pacifique avec notamment un stop à Tahiti. Et pour illustrer son discours, une jolie vahine – dont on imagine plus qu’elle est une Hawaiienne qu’une Tahitienne –, pose sur l’affiche. Ironie du sort, quelques mois après la parution de cette publicité, le 22 juillet 1973, le Boeing 707 de la Pan Am s’abîme en mer, une minute après son décollage de la piste de Faa΄ā.
Charmante escale à Tahiti avec Air New Zealand
La publicité d’Air New Zealand est, elle, exclusivement ciblée sur les rives du Pacifique et les îles. « Le Pacifique peut vous offrir le meilleur des mondes. Air New Zealand a les moyens de vous aider à les relier pour en tirer le meilleur parti. Par exemple, notre timing rend votre charmante escale à Tahiti très pratique… que ce soit avant ou après un rendez-vous d’affaires mouvementé aux États-Unis. Et en Amérique, nous vous débarquons à Los Angeles, qui est le véritable cœur de tout ce qui se passe sur la côte Pacifique américaine. Si vous préférez une escale hawaïenne de toute façon, nous pouvons le faire aussi. Voulez-vous aller d’Australie à Los Angeles : vous voyagerez si vite que vous arriverez le soir même […] » La publicité ne vante pas que la facilité d’accéder aux destinations, elle valorise la cuisine servie à bord, ainsi que la décoration et le confort des cabines du DC 10, le « Big 10 ». « Tout cela fait partie du fait d’être la compagnie aérienne qui comprend le Pacifique. » Bref, « nous sommes le Pacifique ».
Air New Zealand permet alors de relier Sydney et Auckland à Los Angeles en passant par Tahiti. Pour accompagner le texte de la publicité, une photo rassemble les clichés habituels dans un décor ensoleillé :
– premier plan : des fruits à pain, des bananes, une bouteille de bière dans un seau à glace ;
– second plan : de chaque côté d’un cocotier (sur le tronc duquel est attachée une tige de ΄ōpuhi rouge), sur du sable blanc, un homme dans un fauteuil, en chemise pāreu rouge et blanc et en short, un verre à la main, et une femme habillée d’un pāreu rouge, des lunettes de soleil, dans la même attitude décontractée ;
– légèrement en retrait, dans l’ombre du cocotier : un couple « local » vêtu de pāreu, la femme coiffée d’une couronne de tiare tahiti ;
– en arrière-plan : un touriste marche sur la plage ; la mer est d’un bleu-vert et le ciel bleu clair.
L’homme assis serait-il un de ces hommes d’affaires venu se relaxer au paradis tahitien, entre deux rendez-vous stressants ?…
Ouverture du ciel pour Air France
Les deux compagnies anglo-saxonnes sont déjà établies dans le Pacifique, ce qui n’est pas le cas d’Air France dont le réseau ne franchissait pas le Pacifique. En avril 1973, la compagnie annonce qu’elle boucle son tour du monde en ouvrant la ligne Tokyo-Tahiti-Lima. La publicité représente le globe terrestre comme un puzzle auquel il manquait une pièce. Celle-ci est dessinée avec un décalage qui suggère qu’elle va bientôt s’insérer dans l’ensemble.
Le texte en anglais est assez court : « Pour nous, ouvrir une nouvelle voie aérienne n’a rien d’exceptionnel. Après tout, le réseau d’Air France couvre 472 000 km, desservant 154 villes dans 75 pays à travers le monde. Mais Tokyo-Tahiti-Lima, c’est une autre histoire. Elle assure un lien direct entre l’Amérique du Sud et l’Orient. Et permet à notre réseau de faire le tour du globe. Il est donc désormais beaucoup plus facile de planifier des vols de correspondance pour les affaires partout dans le monde. Et en plus, goûter aux délices de Tahiti en cours de route. »
« Les délices de Tahiti ! » Sur la pièce qui va prendre sa place dans le puzzle, on voit à l’ouest un homme d’affaires (costume, cravate, attaché-case) ; il est à Lima et regarde l’océan. À l’est, sans doute le même homme d’affaires est à Tokyo, et il regarde l’océan. Au milieu de l’océan, sur une île – Tahiti –, ce même homme est en short avec motifs de fleurs ; une fleur à l’oreille, il joue de la guitare, et deux vahine aux seins nus sont très près de lui. Le contraste est grand entre la communication d’Air France : joie de vivre, cocotiers, plage et « vahinés », oubli des affaires, et celle d’Air New Zealand : décontraction à l’américaine, repos tranquille au soleil, moment pour souffler, parenthèse dans le business…
La compagnie Japan Airlines devait exploiter la ligne en commun à raison de deux fréquences hebdomadaires ; la clientèle visée était les hommes d’affaires et les touristes nippons. Malheureusement pour Air France, les Japonais, sur fond de crise pétrolière, n’honorèrent pas leur engagement. Air France ferma sa ligne le 10 janvier 1977*. ◆
* Renseignements recueillis sur le site du journal Le Monde du 29 décembre 1976.
Lég
Pan Am Clipper Magazine.
Air New Zealand.
Air France.