Hiro’a n°161 – L’oeuvre du mois : Les «bulles biotopes » de Carine Thierry

L’œuvre du mois

Musée de Tahiti et des îles (MTI) – Fare Manaha

Les «bulles biotopes » de Carine Thierry

Rencontre avec Carine Thierry, artiste. Texte : Vaea Deplat – Photos : Carine Thierry

Après avoir été récompensé par le prix du jury au concours « Tahiti Art en confinement  », le travail plastique des bulles de verre de l’artiste Carine Thierry est à découvrir dans le cadre de l’exposition «  Fa΄aiho, ta΄u tufa΄a, regards d’artistes contemporains » présentée jusqu’en avril 2021 au Musée de Tahiti et des îles.

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Le confinement du mois de mars 2020, l’artiste plasticienne Carine Thierry l’a passé à peindre. «  L’acte de création est une posture d’isolement, d’introspection qui ressemble trait pour trait au confinement que nous avons vécu l’année dernière. Ce côté solitaire et lancinant est indispensable pour démarrer un projet d’art pictural. » Il y a juste un an, Carine postule au concours « Tahiti Art en confinement » et grâce à son tableau Motu, remporte le prix du jury et l’opportunité d’exposer au Musée de Tahiti et des îles pendant six mois, aux côtés de vingt-deux  artistes professionnels et diplômés du Centre des métiers d’art. Lors du lancement de cette expérience artistique collective, Carine a été séduite par la continuité créée entre les artistes et les collections patrimoniales, lien qui permet un changement de regard.

Motu, l’œuvre maîtresse

«  Art en confinement » Si l’œuvre lauréate du concours tout public, représentant un tiki dans une « bulle nourricière », est exposée seule sur les murs du Musée, elle fait partie d’une série de plusieurs tableaux. Ruperupe et Tumu viennent ainsi compléter Motu. «  J’aime travailler les séries, revenir sur un thème tant que j’estime ne pas l’avoir exploré entièrement. Un an après les prémices de la crise sanitaire mondiale, j’ai une infinité de mondes, d’images et de poésie à mettre en bulles de verre.  » Ces «  bulles de décompression  », d’oxygène, toutes polynésiennes, prennent ainsi tout leur sens. Des petits mondes idéaux à préserver. Ces mini serres évoquent également un retour à la nostalgie de l’enfance, le passage vers un espace de liberté, vital et salvateur. « L’art doit coller à ce qu’on vit, et ce qui nous entoure. » Pendant ce temps confiné mais productif, Carine s’est d’ailleurs largement inspirée du jardin tropical à Ahonu, une pépinière de six hectares, dans lequel elle a vécu dix ans.

Le pouvoir et l’énergie de la couleur

Le petit format de Motu (70 x 50 cm) n’enlève rien à sa puissance. Carine aime à rappeler son premier choc esthétique pour La Laitière, une toile de 45,5 x 41 cm du peintre néerlandais Vermeer. Comme autres références artistiques, elle évoque volontiers Chagall, Picasso, Dali, Warhol, sans oublier les couleurs généreuses et obsédantes d’un Rothko ou d’un Gauguin. «  Je crois au pouvoir et à l’énergie de la couleur, j’aime l’idée que les spectateurs soient happés par sa lumière.  » Si elle affectionne particulièrement les richesses de l’ornement d’un Klimt, Carine fait sienne cette citation de Delacroix  : «  Le premier mérite d’un tableau est d’être une fête pour l’œil. » L’artiste, qui vit depuis plus de vingt ans en Polynésie, est formée en arts plastiques et en histoire de l’art et a successivement travaillé à la Maison de la culture, au Conservatoire ainsi que dans différents établissements scolaires. Celle qui a illustré un ouvrage et donne aujourd’hui des cours d’arts au sein de son atelier Art and Craft ne se considère pas comme peintre, mais plus largement comme artiste plasticienne. « Le travail pictural de Carine Thierry est basé sur une recherche d’associations techniques et thématiques, de matières et de contrastes. La variété de ses œuvres reflète ses inspirations et ses recherches plastiques », peut-on lire au Musée de Tahiti et des îles. Ainsi, pour Motu, Carine a utilisé un fond de papier kraft, du papier de soie pour le tiki, de l’acrylique et des marqueurs Posca pour mettre en couleur et en lumière les coraux. «  Le papier de soie apporte de la poésie, ainsi qu’un effet visuel de matière. » Depuis le lancement de l’exposition, le tableau a été acquis par la Présidence.

« J’ai toujours peint, depuis mon plus jeune âge, je n’ai jamais arrêté, j’ai besoin de créer, cela constitue mon équilibre », confie l’artiste, qui a actuellement trois tableaux en cours après avoir exposé et vendu quelques toiles à l’occasion d’une expovente au restaurant gastronomique le Hei début 2020. En avril, pour les dix ans de son atelier, Carine déclinera plusieurs séries de produits dérivés sérigraphiés. « Si toute vie va inévitablement vers sa fin, nous devons durant la nôtre, la colorier avec nos couleurs d’amour et d’espoir », aurait dit Chagall.


PRATIQUE

  • Retrouvez Carine sur les réseaux sociaux
  • Facebook & Instagram @carine.thierry / AtelierArtAndCraft Exposition « Fa΄aiho, ta΄u tufa΄a, regards d’artistes contemporains »
  • Jusqu’au 25 avril, Musée de Tahiti et des îles
  • Retrouvez 22 artistes rassemblés autour de 4 thématiques et des collections du Musée de Tahiti et des îles : A’amu, Alexander Lee, Carine Thierry, Cronos, Gaya, Gotz, Here, HTJ, Jean-Paul Forest, Kala’i Shigetomi, KNKY, Libor Prokop, Ninirei Temaiana, Omaira Tuihani, Patricia Bonnet, Robert Toa, Sébastien Canetto, Stéphane Motard, Tahe, Teva Victor, Tvaite, Yvenka Klima.
  • Ouvert du mardi au dimanche, de 9 heures à 17 heures
  • Durant le mois de mars et d’avril, les visites guidées (dans le respect des mesures sanitaires en vigueur) seront proposées les samedi matin de 10h00 à 11h30, en compagnie des artistes. Plus de détails sur le site Internet du Musée, ou à [email protected] ou au 87 790 797
  • Achetez vos billets en ligne sur www.museedetahiti.pf, onglet Billetterie.

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