N°103 – Les artisans et la réglementation sur la protection des espèces marines

Service de l’Artisanat Traditionnel – Pu ‘ohipa rima’ibaby-turtle-01

 

Texte : MD – Photos : DR / MD

Rencontre avec Tiare Penilla Y Perella, de la Direction des Ressources Marines et Minières.

Source : Direction des Ressources Marines et Minières et Service de l’Artisanat Traditionnel.

 

 

Beaucoup de matières premières utilisées par les artisans polynésiens des quatre coins des archipels sont soumises à une réglementation très stricte. La Direction des Ressources Marines et Minières, la Direction de l’Environnement et le Service de l’Artisanat Traditionnel font un travail de sensibilisation auprès des artisans afin qu’ils s’adaptent aux restrictions, mises en place pour protéger la biodiversité polynésienne.

 

Le burgau (maoa taratoni), le bénitier (pahua), le troca ou encore le triton (pu) : des coquillages que l’on trouvait autrefois sur les stands d’artisans. Mais la vente de ces produits est soumise à une réglementation stricte que beaucoup ne connaissent pas. Parfois, les artisans eux-mêmes l’ignorent mais ces dernières années, de nombreuses campagnes de sensibilisation ont été menées pour informer tous les acteurs du secteur de l’artisanat. En fait, c’est la délibération n° 88-184 AT du 8 décembre 1988 relative à la protection de certaines espèces marines et d’eau douce du patrimoine naturel polynésien qui pose le cadre juridique de l’exploitation de ces ressources. La liste comprend plusieurs espèces et la loi fixe explicitement les règles de préservation. Par exemple, « il est strictement interdit de pêcher, de transporter, de détenir et de commercialiser » le burgau et le troca à moins de présenter un document de traçabilité validé par la Direction des Ressources Marines et Minières. Ces deux coquillages ont longtemps fait parties des principaux matériaux utilisés par les artisans, les sculpteurs notamment, mais tout cela est en train de changer. Des visites des stands de ventes de produits artisanaux du marché de Papeete, des kiosques et des bijouteries du centre ville ont été effectuées ces dernières années. Par ailleurs, les agents de développement de la circonscription des Tuamotu – Gambier font également un travail de sensibilisation durant les missions, ce qui permet de toucher un plus grand nombre d’artisans.

 

Des supports de communication pour informer les artisans

 

La Direction des Ressources Marines et Minières (DRMM) fait un important travail d’information auprès des pêcheurs, des particuliers mais aussi auprès des artisans, en collaboration avec le Service de l’Artisanat Traditionnel. Plus de 300 livrets présentant un échantillon d’espèces protégées et réglementées en Polynésie Française ont été distribués aux artisans : « Le problème, ce n’est pas l’information car on a mis en place des campagnes de sensibilisation auprès des artisans lors d’événements auxquels ils contribuent » nous confie Tiare Penilla Y Perella de la DRMM. « Dans l’ensemble, lorsqu’ils sont informés, les artisans utilisent d’autres ressources qui ne sont pas interdites. Mais il y a toujours des réticences » poursuit-elle. La surveillance doit donc être efficace et souvent, des inspections sont effectuées par des agents de l’administration lors d’expositions artisanales. « Les agents de la DRMM n’ont pas la capacité de verbaliser et ce sont seulement les gendarmes et les douaniers qui peuvent le faire. Nous, nous faisons des PV de constat. On constate l’infraction que l’on transmet au procureur et c’est lui qui choisit ou non de verbaliser ». Selon Tiare Penilla Y Perella, les artisans sont avertis la première fois et ne recommencent pas. En règle générale, les amendes sont appliquées lorsque les contrevenants sont en état de récidive. Elles peuvent atteindre les 300 000 Fcfp !

 

Le code de l’environnement local regroupe des textes qui légifèrent la protection, la mise en valeur, la restauration et la gestion des ressources naturelles ou des espèces animales en Polynésie française. L’exploitation de certaines autres espèces marines est réglementée par la CITES : la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction, plus communément appelée « la convention de Washington ». Ce document ratifié en 1973 vise à préserver la biodiversité et repose sur une utilisation durable des espèces sauvages. La Délégation régionale à la recherche et à la technologie (DRRT), qui est un service publique d’Etat, est informée des dernières rectifications de la liste CITES qui est régulièrement modifiée. Son application est assurée en Polynésie par la Direction de l’Environnement (DIREN).

 

Parmi les espèces protégées : certains coraux et coquillages, les baleines, les requins ou encore les tortues. Certains artisans utilisent les dents, les os, les écailles ou les carapaces de ces mammifères marins pour leurs créations. Mais ce qu’ils ignorent, c’est que même si l’animal n’a pas été pêché, l’utilisation de la matière est formellement prohibée. La règle s’applique également lorsqu’un cachalot ou une baleine échoue sur le récif ou la plage. Le troc est aussi un aspect à prendre en compte car parfois, les artisans se fournissent directement auprès des pêcheurs ou des perliculteurs. L’exemple des rebus de perles que certains artisans utilisent pour des colliers ou des bracelets, ce qui est strictement interdit, est le cas le plus courant. Ces dernières années, ce type d’exemple se fait de plus en plus rare mais selon la DRMM et le Service de l’Artisanat Traditionnel : « cela évolue dans le bon sens ».

 

 

Témoignage de Papa Narii, de l’association Pohue Rahi 

 

« Avant, on utilisait le burgau – que l’on achetait aux pêcheurs – pour la confection de bijoux par exemple. Nous savons qu’il est désormais interdit de l’utiliser sans traçabilité mais le coquillage est toujours recherché pour ses reflets nacrés. Nous sommes informés sur la réglementation car le Service de l’Artisanat Traditionnel nous a transmis les brochures, mais certains ne la respectent pas. Je trouve que la règlementation est une bonne chose car cela permet de protéger les espèces. »

 

 

Pour en savoir plus : www.peche.pf

 

 

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