Hiro’a n°190 – Dossier

Dossier – Maison de la culture (TFTN) – Te Fare Tauhiti Nui

Un forum pour valoriser les métiers du primaire et de l’artisanat

Rencontre avec Vanessa Cuneo, responsable du pôle développement et communication au Service de l’artisanat traditionnel – Te pū ‘ohipa rima’ī, Eriata Tefafano de l’entreprise ΄Āu΄a Tahiti. Texte : Delphine Barrais – Photos : ART et G.Boissy

Le Service de l’artisanat traditionnel – Te pū ‘ohipa rima’ī, en partenariat avec la Chambre de l’agriculture et de la pêche lagonaire (CAPL), la Direction des ressources marines (DRM) ainsi que les enseignements agricoles, organise un forum des métiers du primaire et de l’artisanat traditionnel. L’objectif ? Redonner leurs lettres de noblesse à ces professions peu valorisées.

C’est la première fois qu’un tel événement est organisé. Le forum des métiers du primaire et de l’artisanat traditionnel a lieu le 19 octobre à Papeete. Il est organisé par le Service de l’artisanat traditionnel – Te pū ‘ohipa rima’ī en partenariat avec la CAPL et la DRM, ainsi que les enseignements agricoles. Il invite le public à découvrir différents métiers en visitant des stands – il y en aura plus d’une trentaine –, en rencontrant des professionnels ou bien encore en profitant de démonstrations, animations et conférences. « L’objectif est de valoriser les différents métiers de l’artisanat traditionnel et du secteur primaire via les différentes professions existantes. Nous mettrons en lumière les options d’orientation, de formation et d’insertion professionnelles », annonce Vanessa Cuneo, responsable du pôle développement et communication au Service de l’artisanat traditionnel – Te pū ‘ohipa rima’ī.

Mer, terre et artisanat

Les organisateurs espèrent que ce forum va changer la vision que le public et les scolaires peuvent avoir des différentes filières présentées. « Nous pensons que ces métiers représentent des voies professionnelles d’avenir, qui font sens, et nous espérons, par ce type de projet, faire en sorte que ces métiers soient véritablement ‘choisis’ et non plus retenus par défaut. » Les filières du primaire et de l’artisanat restent peu valorisées « parce qu’il y a une méconnaissance des débouchés et de toutes les voies professionnelles qui existent. Cet événement est organisé pour redonner leurs lettres de noblesses à ces professions ». Les métiers du primaire ont été identifiés grâce à la participation de la DRM pour toute la partie mer et de la CAPL, ainsi que des  enseignements agricoles pour la filière correspondante. 

Ainsi, le public pourra trouver parmi les exposants un stand sur la pêche hauturière, côtière et lagonaire avec la présentation des métiers de capitaine de thonier et de marin pêcheur, les filières aquacoles, et les formations données par le Centre des métiers de la mer de Polynésie française (CMMPF). Côté agriculture, les visiteurs pourront rencontrer toutes les structures d’enseignements agricoles qui existent en Polynésie (Lycée agricole de ‘Opunohu, les MFR, CFPPA), mais également des professionnels du domaine tels que les stands Eko Culture, tenu par Greg Gobrait agriculteur et agro-transformateur, Murmure d’abeille, avec Roniu Lagarde, apiculteur, ou encore un stand sur l’élevage animé par Natacha Coppenrath, éleveuse. La CAPL et la Direction de l’agriculture auront également des stands et pourront renseigner les publics sur leurs missions et les aides qu’ils proposent.

Enfin, les métiers de l’artisanat seront représentés par les artisans eux-mêmes, notamment Vainui Barsinas, vannière experte et formatrice ‘Ihi rima’ī mā’ohi, ou encore Rava Ray, artisane ‘Ihi rima’ī mā’ohi, experte et formatrice en confection de tīfaifai. Le public pourra aussi rencontrer Tehina Manutahi, artisane spécialisée en bijouterie traditionnelle et Tevahine Teariki, préparatrice de matières premières (nī΄au blanc, reva reva, etc.). De plus, le Service de l’artisanat traditionnel – Te pū ‘ohipa rima’ī occupera également un stand afin de présenter ses dispositifs d’aide au développement du secteur.

Démonstrations et conférences

La journée sera également rythmée par des démonstrations des métiers et des conférences animées par des «  modèles de réussite ». Il s’agit de professionnels au parcours remarquable qui parleront de leur mé.tier, de leur formation, des difficultés et des satisfactions que leur apporte leur quotidien. Le public pourra ainsi écouter, entre autres, les parcours inspirants de Hinatea Colombani, fondatrice de ‘Arioi experience, artisane experte et formatrice ‘Ihi rima’ī mā’ohi en fabrication de tapa, ou de Mahanatea Garbutt, spécialiste en aquaculture et plongeuse professionnelle, ou encore Raimoana Oito, technicien agricole. En plus de ces rencontres, les visiteurs pourront aussi assister à des interventions comme la présentation de la formation à l’installation agricole (FIA) animée par un intervenant du lycée de ‘Opunohu, ainsi que la DRM qui interviendra pour parler des filières aquacoles. Côté démonstrations de métiers, les visiteurs pourront découvrir les étapes de confection d’un tīfaifai, la sculpture sur os, assister à la fabrication d’engrais de poisson, le greffage et le repiquage de plantes ou encore tout savoir sur la restauration corallienne. Quoi de mieux, pour le public en quête d’orientation, que de rencontrer ceux qui vivent les métiers et les pratiquent au quotidien ?

Scolaire et grand public

Le forum s’adresse au grand public mais aussi aux scolaires de la classe de 4e jusqu’aux niveaux post-Bac, en filière générale, professionnelle ou technique. Il n’y aura pas d’animations conçues spécialement pour les scolaires. « Nous avons prévu un programme qui devrait, nous l’espérons, convenir à tous les visiteurs. L’espace de démonstration devrait leur permettre d’avoir une présentation du métier de façon concrète et attractive, les rencontres avec des “modèles de réussite” devraient apporter leur lot de réponses. » Ces “modèles de réussite”  sont des personnes issues des différentes filières qui parleront de leur parcours professionnel, parfois atypique mais non moins inspirant. Le Centre d’orientation et d’insertion de la Direction générale de l’éducation et des enseignements (DGEE) sera également présent. Des représentants auront un stand et pourront répondre à toutes les interrogations des élèves sur leur choix d’orientation professionnelle.

Les visiteurs trouveront tout autant des réponses, qu’ils aient l’ambition de créer une entreprise, de se réorienter, de se former ou de développer l’un des métiers présentés. Un espace est prévu en particulier pour les entrepreneurs. afin de les informer des possibilités de financement et de sujets importants tels que la propriété intellectuelle par exemple. Ainsi, des représentants de la Chambre de commerce, d’industrie, des services et des métiers (CCISM), mais aussi d’Initiative Polynésie et des organismes financiers tels que la Sofidep, l’Adie et la Banque Socredo, auront leur stand. Le Sefi également sera sur place pour présenter les dispositifs d’aide à la création d’entreprise. Tandis que la DRM, la CAPL et le Service de l’artisanat traditionnel – Te pū ‘ohipa rima’ī resteront disponibles pour informer de toutes les possibilités qui s’offrent à eux. Des fiches métiers ont été réalisées spécialement pour le forum : elles décrivent les métiers de la terre, de la mer et de l’artisanat. Ces dernières, à l’image du forum, visent à présenter les métiers de manière réaliste. Il s’agit de les valoriser sans pour autant omettre leurs contraintes et leurs inconvénients. Elles sont disponibles en ligne et seront également distribuées sur place le jour J. Six mille exemplaires ont été imprimés, les visiteurs pourront ainsi repartir avec pour affiner ensuite leur projet à tête reposée.

« Valoriser nos richesses »

Ce forum a pour enjeu de montrer que la Polynésie française dispose de ressources à fort potentiel qui restent sous-estimées. Eriata Tefafano, co-fondateur de ΄Āu΄a Tahiti, pense notamment à. la noix de coco. « On ne l’exploite pas suffisamment. Ce serait bien si les gens pouvaient valoriser ce qui est, aujourd’hui, considéré comme un déchet. » Une fois le coprah retiré, bourre et coques sont, aux mieux, broyées, au pire, brûlées. « Cela pourrait être un moyen de vivre, une richesse. En pratique, c’est du gaspillage. » 

Eriata Tefafano est originaire de Mataiva, il a pu observer ce qui se passe dans les îles. « Il faut que les gens des îles restent là où est leur foyer. Quand ils viennent à Tahiti, certains, à la longue, se retrouvent isolés, sans abri. » Il a cofondé ΄Āu΄a Tahiti en novembre 2020 avec Kihi Tuiho. Il fabrique des bols en coco, des plateaux de sashimi, des couverts en bois local. En trois ans, sa clientèle a grandi et s’est diversifiée. Les résidents sont de plus en plus nombreux. « Au début on vendait principalement aux touristes. Maintenant on a des locaux, des pensions, des hôtels. » Il est déjà intervenu en collège et lycée où il a pu parler de son parcours et de son entreprise. Il voit que son discours touche. Les élèves qu’il a pu rencontrer sont sensibles à ses présentations, son histoire, les mots qu’il choisit. Au forum des métiers du primaire et de l’artisanat, il « laissera faire les sentiments ». Il sait que cela porte.Il aura avec lui certains de ses produits, il décrira son quotidien. Il ne cachera pas les difficultés, mais partagera sans retenue son enthousiasme et sa motivation. Il tient aussi à expliquer que « tout est possible ».

Lui-même n’a pas fait de formation, il a appris sur le terrain. Pour cela, il faut du courage et de la persévérance, « mais les efforts payent »! ◆

PRATIQUE

• Le forum des métiers du primaire et de l’artisanat traditionnel aura lieu le jeudi 19 octobre de 7h30 à 17 heures à l’Assemblée de la Polynésie française.

• Entrée libre et gratuite.

• Plus d’informations en scannant le code QR

• Ou sur www.artisanat.pf et la page Facebook @artisana.pf

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Programme du Forum

7h30 : Ouverture du Forum

8 heures : Inauguration

Rencontres avec des « modèles de réussite »

9h30 : Hinatea Colombani , fondatrice de ‘Arioi experience, artisane experte et formatrice ‘Ihi rima’ī mā’ohi en fabrication de tapa

9h45 : Les dispositifs d’aide au développement des artisans traditionnels par Vaiana Giraud, cheffe du Service de l’artisanat traditionnel

10 heures : Présentation de la formation à l’installation agricole (FIA) par Christophe Bernard (formateur CFPPA), Hinau Otcenasek(FIA), Soraya Ariihohoa (agricultrice maraîchère certifiée Bio) et Miranda Flohr (apicultrice)

10h30 : Lewis Anania, capitaine et marin pêcheur (pêche hauturière)

10h45 : Banque Socredo, acteur majeur du développement durable du secteur primaire et de l’artisanat

11 heures : La propriété intellectuelle par la DGAE

11h15 : Le microcrédit accompagné par l’Adie

11h30 : Kihi Tuiho et Eriata Tefafano , fondateurs de ‘Āu΄a Tahiti, entreprise spécialisée en revalorisation du cocotier

12 heures : Tuherenui Toofa , technicien en agriculture et élevage

12h30 : Tevahine Teariki, préparatrice de matères premières, experte et formatrice ‘Ihi rima’ī mā’ohi

13 heures : Les filières aquacoles en Polynésie française et les métiers associés par Matangi Moeroa

13h30 : Les outils et leviers de financement par la Sofidep

14 heures : Rava Ray et Béatrice Legayic, expertes en couture et tīfaifai – textiles

14h15 : Mahanatea Garbutt, spécialiste en aquaculture et plongeuse professionnelle pour les travaux sous-marins

14h30 : Présentation du BTSA Agriculture avec Tuhani Pugibet (agriculteur bio), Heiva Faatauira (animatrice agricole), Watson Poroi (agent communal en charge de l’environnement et de l’agriculture), Manarii Langlois

15 heures : Le développement d’une filière de culture d’algues en Polynésie française par Corentin Salvan

15h30 : Raimoana Oito, Technicien supérieur agricole

Démonstrations des métiers

8 heures – 9h30

Les étapes de confection d’un tīfaifai par Rava Ray et Béatrice Legayic

La fabrication d’un piège pour la mouche des fruits et détection de la petite fourmi de feu

La découverte des pontes de coraux en lien avec Matari’i i ni’a par l’association Tama No Te Tairoto

La technique de tressage appelée raraga matua par Tevahine Teariki

10 heures – 11h30

La revalorisation du cocotier par ‘Āu΄a Tahiti

La sculpture sur os par Derry Changuy

L’aquaculture de bénitier par Moerani Lehartel, fondateur de Tahiti Marine Aquaculture

La découverte des pontes de coraux en lien avec Matari’i i ni’a par l’association Tama No Te Tairoto

Le greffage, le repiquage et la présentation de petits animaux par Bio Fetia

12 heures – 13h30

La médiation culturelle par le centre culturel ’Arioi.

La découverte des pontes de coraux en lien avec Matari’i i ni’a par l’association Tama No Te Tairoto

Le tressage du roseau de montagne par Vainui Barsinas, vannière experte et formatrice ‘Ihi rima’i mā’ohi

La fabrication d’engrais de poisson

14 heures – 15h30

Le travail du nape, de la récolte au tressage par Jean-Yves Tuihaa, bijoutier spécialiste en fibre de coco et expert et formateur ‘Ihi rima’i mā’ohi

Le nī’au blanc et la confection de bijoux traditionnels par Tehina Manutahi, bijoutière traditionnelle

La restauration corallienne et les algues par Jessica Tran de l’association Tamari’i Pointe des pêcheurs

La découverte des pontes de coraux en lien avec Matari’i i ni’a par l’association Tama No Te Tairoto

La machine à café de la MFR (Maison familiale et rurale) de Taharu’u-Papara

18h : Clôture de la journée

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Avec Tua, ils nous parlent de leur métier

Tua, un média 100 % digital, est destiné à mettre en avant les entrepreneurs de demain mais aussi des métiers. Il cherche à inspirer les prochaines générations. Ce programme valorise les initiatives solidaires, écoresponsables et/ou innovantes en vue de mettre en avant des hommes et des femmes acteurs du changement au fenua. Pour le forum, Tua a réalisé une vingtaine de portraits dans les trois domaines (terre, mer et artisanat) pour mettre en avant les professionnels autrement. L’équipe est allée à leur rencontre et a réalisé des portraits dans un format adapté. Les vidéos durent entre deux et trois minutes. Elles sont toutes construites sur le même modèle. L’internaute peut, de cette manière, découvrir Derry Changuy, graveur- sculpteur, Heinui Poltavtseef, greffeur d’huîtres perlières ou encore Vehine Gendron, responsable de production. Les professionnels répondent à diverses questions de manière décontractée et avenante : en quoi consiste ton métier ? Pourquoi ce métier ? Quelle est ta formation ? Une anecdote ? Un conseil pour les jeunes ? C’est un job pour qui ?… Dans certaines vidéos, des photographies des professionnels en situation permettent de se faire une idée des conditions de travail. Les vidéos sont en ligne, sur les réseaux, et seront diffusées pendant le forum.

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