Hiro’a n°184 – L’œuvre du mois

Direction de la culture et du patrimoine (DCP) – Te Papa Hiro ́a e Faufa ́a Tumu

« L’histoire ancienne de Rurutu, d’après les puta tupuna de l’île »

La Direction de la culture et du patrimoine a publié récemment son neuvième Cahier du patrimoine, intitulé « L’histoire ancienne de Rurutu, d’après les manuscrits (puta tupuna) de l’île ». Écrite par Bruno Saura, professeur de civilisation polynésienne à l’université de la Polynésie française, c’est une publication comme il n’y en avait plus eu depuis plus de quinze ans et qui réactive le cœur de mission de cette direction.

Depuis 2005, il n’y avait plus eu de parution des Cahiers du patrimoine. C’est le professeur de civilisation polynésienne à l’université de la Polynésie française, Bruno Saura, avec « L’histoire ancienne de Rurutu, d’après les manuscrits (puta tupuna) de l’île » qui relance le mouvement. Ce neuvième Cahier du patrimoine, édité par la Direction de la culture et du patrimoine (DCP)-Te Papa Hiro ́a e Faufa ́a Tumu est le fruit de longues années de recherches, de nombreux séjours à Rurutu et de rencontres avec des personnes ressources. C’est un « retour aux sources et aux missions premières de la DCP », selon Joany Cadousteau, sa directrice, « à savoir la sauvegarde et la diffusion du patrimoine matériel et immatériel ».

Œuvre d’historien et d’ethnologue

Cet ouvrage propose une approche historique du passé de Rurutu (île des Australes), au moyen de la comparaison de ses manuscrits traditionnels, puta tupuna, apparus à la fin du XIXe siècle. Des extraits en sont reproduits, accompagnés de commentaires replaçant cette île dans une communauté de culture la reliant aux autres îles des Australes, de la Société et des Cook. « C’est un bonheur d’être publié », assure Bruno Saura, « car un livre sur Rurutu, ce n’est pas forcément pour le grand public, comme un ouvrage sur le tīfaifai ou la cuisine… J’espère que ce livre sera encore lu dans cinquante ans… J’ai fait œuvre d’historien et d’ethnologue » car les traditions orales de Rurutu ont été écrites par les gens de Rurutu, ce qui rend la comparaison possible des sources, et notamment avec celles qui se trouvent au Peabody Museum de Salem (États-Unis).

Un travail long et compliqué

« Ce fut un travail long et compliqué. Il a d’abord fallu que j’accède à ces sources en me déplaçant, ensuite il a fallu lire ces vieux manuscrits où on ne sait pas si c’est un « o » ou un « a » qui est écrit et les comprendre, mais là, je me suis fait aider par des gens de Rurutu », explique l’anthropologue. Toutes ces longues années de recherches ont abouti à une année d’écriture afin d’arriver à ce Cahier du patrimoine. Dans les traditions orales de Rurutu, devenues écrites, il est beaucoup question du personnage de  ́Iro (Hiro) ou plutôt des  ́Iro. En effet, ils sont plusieurs à Rurutu, tant à l’intérieur des généalogies qu’au sein des récits narrant leurs déplacements et les hauts faits. « Plusieurs chapitres sont consacrés à Amaiterai, qui est un grand héros, semi-historique, semi-légendaire de Rurutu », détaille l’auteur.

L’origine américaine : une croyance persistante

Est ainsi déroulée la trame de temps, depuis les mythes de la nuit originelle jusqu’à la survenue d’événements de plus en plus historiques, à travers des parcours migratoires, la succession des chefs, la construction des marae ou encore des chroniques de guerres.

« Il y a là une histoire intérieure foisonnante, qui témoigne de la nature profondément religieuse, merveilleuse, poétique et aussi politique de l’ancienne culture de Rurutu », selon la DCP. En faisant ses recherches, Bruno Saura, même s’il le savait, a été surpris par le fait que « les gens de Rurutu, à partir des années soixante, se sont mis à dire qu’ils avaient des ancêtres incas qui venaient d’Amérique du Sud ». « Ils avaient des ancêtres liés à la couleur rouge, aux plumes rouges qui sont des plumes très glorieuses chez les Polynésiens, mais pas qui avaient la peau rouge ou qui étaient des peaux rouges. Cette déformation apparait dans les années soixante. Maintenant, beaucoup de gens de Rurutu, parce que leurs parents ou grands-parents ont déjà entendu ça, croient dur comme fer que leurs ancêtres venaient d’Amérique du Sud. » Et comment évoquer l’histoire ancienne de Rurutu sans évoquer la statue A’a. Bruno Saura lui accorde aussi quelques pages parmi les trois cent quarante-six autres qui ne manqueront pas de nourrir l’intérêt de tous ses lecteurs… à travers les âges. ◆

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Ce qu’on peut y lire

Première partie : les sources

– Les archives

– Les écrits des années 1960 et ultérieures

– Les autres sources

Seconde partie : extraits et commentaires

– Le monde des origines

– Une tradition archaïque

– Traditions migratoires des ancêtres des Teuruarii

– Perspectives comparées : Hiro aux îles Australes

– Les  ́Iro à Rurutu

– De Hiro à Amaiterai : une période de stabilisation.

– La continuation des liens avec Tupua ́i : l’époque

de Teuruarii

– Amaiterai

– L’après-Amaiterai : des guerres de territoires

– La centralisation du pouvoir

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PRATIQUE

« L’histoire ancienne de Rurutu, d’après les manuscrits (puta tupuna) de l’île » par Bruno Saura.

• Collection : Cahiers du patrimoine.

• Édité par la Direction de la culture et du patrimoine (DCP) – Te Papa Hiro ́a e Faufa ́a Tumu.

• Tiré à 2 000 exemplaires, 346 pages.

• En vente à la Maison de la culture – Te Fare Tauhiti Nui (TFTN) et au Fare Iamanaha – Musée de Tahiti et des îles, à 1 600 Fcfp.

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