Hiro’a n°177 – Culture Bouge: Sur le Marae Arahurahu : « Pi’i Fenua ou l’Appel de la Terre », de Tahiti Ia Ruru Tu Noa

Culture Bouge

Conservatoire artistique de Polynésie française (CAPF) – Te Fare Upa Rau

Rencontre avec Moearii Darius et Olivier Lenoir, fondateurs de Tahiti Ia Ruru Tu Noa, et Mirose Paia, auteure. Texte : Lucie Rabréaud – Photos : Stéphane Sayeb pour Capf/22

La  troupe fondée par Olivier Lenoir et sa compagne Moearii Darius a été choisie, cette année, pour présenter au grand public et aux amoureux de la Culture cinq spectacles sur les espaces du marae Arahurahu, à Paea. Danser sur ce site, écrire pour ce site, monter un spectacle sur ce site est « particulier ». Mirose Paia, l’auteur, s’est inspirée d’une très ancienne légende autour du marae Arahurahu pour faire vivre « Pi’i Fenua ou l’Appel de la terre ». Programmés à partir du samedi 16 juillet, ces spectacles sont produits par le Conservatoire artistique Te Fare Upa Rau, avec le soutien du Ministère de la Culture.

C’est une histoire de terre, une histoire de frères, une histoire de bataille. La troupe Tahiti Ia Ruru tu Noa fera le spectacle sur le marae Arahurahu au mois de juillet. Pi’ifenua s’inspire d’une légende sur le site que Mirose Paia, l’auteur, Moearii Darius et Olivier Lenoir, les fondateurs de la troupe, ont retrouvé dans les archives du service du patrimoine. « On ne connait pas l’histoire de ce marae et nous voulions la retrouver. Quand on retrouve des légendes anciennes comme celles-ci, l’intérêt est de les faire connaitre. Il y a tellement de choses qu’on ignore encore… Quand on trouve des histoires, on veut les partager », explique Moearii Darius. À travers ce spectacle où deux guerriers, frères ignorés, vont se battre pour la terre et la place de chef, Olivier Lenoir voulait parler de « l’appel de la terre », « le retour aux origines ». « Ne sommes-nous pas profondément liés, corps et âme, à la terre, qu’on le veuille ou non ? C’est la terre de nos ancêtres qui devient notre terre par héritage, mais pas seulement. Si seulement, nous pouvions entendre cet appel de la terre, si nous pouvions suivre cette force intérieure qui nous pousse à retourner vers elle, à nous réconcilier avec elle ; à en apprécier la dignité et les bienfaits, à la regarder autrement, à l’entretenir, à nous battre pour la garder, à la protéger et à nous unir tous ensemble pour la transmettre à la génération future », est-il écrit pour présenter le thème du spectacle. Un thème particulièrement d’actualité pour Olivier Lenoir : « Dans les familles, on se bat pour un bout de terrain, la terre divise. Il faut respecter la terre, être uni. »

 

Cette représentation sur le marae est une première pour Tahiti Ia Ruru tu Noa mais pas pour Olivier Lenoir qui a participé aux représentations historiques sur le marae orchestrées par tavana Hare Salmon. C’est aussi pour lui rendre hommage qu’Olivier Lenoir a souhaité faire ce spectacle, auquel il pensait déjà depuis plusieurs années. « J’ai toujours voulu faire un spectacle sur le marae. Ça n’a rien à voir avec To΄atā, c’est un endroit où tu ressens quelque chose, le mana. C’est un lieu où les anciens venaient se recueillir. C’est quelque chose que je ressens de manière très forte. » Le chef de Tahiti Ia Ruru tu noa s’est entouré de danseurs chorégraphes pour créer le spectacle, se concentrant sur la mise en scène, très particulière avec les multiples espaces du site. Le marae, la falaise, les plateformes… Tout sera utilisé pour époustoufler le public et surtout transmettre cet appel d’un plus grand respect de la terre. Comme à chacun de ses spectacles, les costumes seront entièrement végétaux : « Je n’utilise pas de plastique, nylon ou ruban, tout vient de la nature. Ce qui permet à cette jeunesse de découvrir cette façon de faire car ça ne pollue pas. C’est biodégradable. Je suis très attaché au respect de la nature. » Si la guerre va un moment résonner sur le marae Arahurahu, l’histoire se termine bien. La fraternité et la paix vont triompher dans ce spectacle produit, comme chaque année, par le Conservatoire de la Polynésie française.

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Encadrés :

« Pi’ifenua » s’inspire de la légende du marae Arahurahu

 

Tematahia est le grand chef de Ahototuaana, un clan puissant dont le marae, Matamatahia, est précieusement gardé par des nymphes Hina-pō-tea : sous la surveillance de ce grand chef despote, elles envoutent et attrapent les âmes errantes dans leurs filets aux pouvoirs magiques. Temataaro est l’illustre grand guerrier du clan Tumufau vivant dans les endroits reculés à l’intérieur des terres et sur les montagnes escarpées. Un jour, Temataaro, mu par des forces puissantes, s’aventure avec ses hommes jusqu’à Ahototuaana : ils sont pris dans les filets des Hina-pō-tea. Après de vaines négociations le grand prêtre Tohuroa, de Tumufau, se décide à révéler un grand secret : Temataaro, d’alliance du pō, se trouve être le frère aîné de Tematahia. Mais ce dernier, dans le déni, décide de la mise à mort immédiate de son frère Temataaro sur le marae. C’était sans compter sur le clan Tumufau et ses fameux guerriers Pi’imato, qui descendent de la montagne. La guerre, inévitable, éclate entre les deux clans.

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Mirose Paia, auteur

En quoi a consisté votre travail d’auteure ?

Mon texte s’appuie sur une légende du marae Arahurahu. Je pouvais reprendre cette légende mais j’ai préféré m’en inspirer pour une création qui correspond au thème choisi : l’appel de la terre. Mon texte reflète également la culture, la langue, le patrimoine à sauvegarder et bien sûr je me suis adaptée au chef du groupe et à sa philosophie.

 

Quel est le message que vous souhaitiez faire passer ?

Toutes les civilisations ont ce rapport étroit avec la terre mais dans les îles, ça prend une autre proportion car nous sommes entourés d’eau. La terre devient plus importante. Il y a une forme de symbiose entre l’humain et la terre. C’est cette thématique que nous avons voulu travailler. J’ai repris des éléments de civilisation en parlant des premiers occupants qui étaient installés plus en vallées et en montagnes que sur le littoral. Je voulais également valoriser les pi’imato qui étaient des guerriers qui vivaient dans la montagne, chargés de récupérer les ossements pour les préserver de la sorcellerie et les cacher dans les grottes. Olivier est aussi versé dans la protection de l’environnement et je voulais valoriser son travail.

 

Est-ce différent d’écrire pour un spectacle sur le marae que pour un spectacle sur To’ata ?

Oh oui ! C’est un honneur de pouvoir écrire et former un spectacle autour du marae. Quand on met les pieds au marae, on est plongé dans un autre monde. On se rend compte que toutes les choses sont vivantes, on est dans la nature. C’est plus spirituel que To΄atā. Ça n’a presque rien à voir. C’est presque transcendant !

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  • Pratique :

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Cinq spectacles les samedis et dimanches 16/17, 23/24 et 30 juillet, à 15h45.

Tarif unique : 2 000 Fcfp – En ligne avec www.ticketpacific.pf ; dans les magasins Carrefour et à Radio1/Tiare FM (Fare Ute) ; sur place les jours de spectacle à partir de 14 :00.

Renseignements : 40 501 414 et accréditations :  [email protected].

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