N°134 – Le costume du ‘aparima ‘āmui, tableau final de la troupe Hei Tahiti au Heiva 2018

 

Musée de Tahiti et des îles (MTI) – Te fare Manaha134 - Œuvre du mois - Costume MTI - Crédit Meria Orbeck

 

Rencontre avec Tiare Trompette et Yann Paa, de la troupe Hei Tahiti. Texte : Meria Orbeck.

 

Menée par Tiare Trompette, la troupe Hei Tahiti a remporté cette année le 2e prix en catégorie Hura tau au Heiva i Tahiti. Son grand costume a marqué les esprits du public et celui du jury qui lui a attribué le prix suprême. Il a été intégré à l’exposition La danse des costumes du musée de Tahiti et des îles en août.

 

Le ‘aparima ‘āmui final vient marquer l’apothéose du magnifique spectacle offert encore une fois par la troupe Hei Tahiti. Un spectacle très attendu sur un thème particulièrement marquant. En effet, ‘Oteu fenua – Mon bourgeon de terre, relate le viol de la reine Hinarere, de Tefareari’i à Huahine, le sacrifice de son frère et l’origine légendaire du tiare tahiti. « Il nous a fallu trois semaines après la clôture du thème et la visite des sites sur Huahine pour concevoir le costume du tableau final. C’était aussi le temps nécessaire au choix des matériaux », confie Tiare Trompette.

Yann Paa, auteur du thème, explique la signification générale du costume : « Le rouge, porté par les danseuses, représente le rang royal mais aussi le sang du viol. Le blanc des garçons symbolise la pureté et l’innocence de la jeune reine et l’amour fraternel de son frère. Ce sont aussi les couleurs traditionnelles de l’île de Huahine. Les tresses rappellent le lien entre les deux jeunes gens. »

La coiffe du costume est particulièrement remarquable. « Le chapeau donne la forme d’un pétale de fleur. Le costume vient rappeler non seulement le résultat de ce viol (la métamorphose de cette femme en tiare tahiti) mais aussi que notre histoire, qui fait partie de notre identité culturelle, doit s’épanouir dans le temps à travers la jeunesse polynésienne (représentée par les danseurs/ses de Hei Tahiti). Dans le cas contraire, notre histoire se flétrit », estime Yann Paa.

La fusion des deux chapeaux, symbole d’espoir134 - Œuvre du mois - Costume MTI - Tiare Trompette, Yann Paa et Heifara Morienne - Crédit Lucien Pesquié

La forme du chapeau rappelle aussi le lieu du viol, la petite baie de Fa’atetoro (anciennement appelé Fa’auretoro) et la grande baie de Maro’e, dont les berges illustrent les jambes tremblotantes de Hinarere. La fougère en bois de noix de coco est le symbole de l’île de Huahine, le nahe to’eto’e – fraîche fougère. La graine noire du ti’anina, accrochée sur le ni’au sec, représente le viol, la souillure. Les pitipiti’o (graines du Cardinalier) représentent le lieu (Tehoro) où a été enlevée cette femme sous les yeux de son frère. Dans la chorégraphie, les deux chapeaux « fusionnent pour illustrer la relation fraternelle de la reine et de son frère, le lieu d’appartenance de cette histoire (Huahine), l’éclosion complète de cette fleur. C’est un message d’espoir », précise l’auteur.

Si Hei Tahiti a porté cette histoire cette année, c’est parce qu’il était important de rappeler au public qu’il n’y a pas de honte à raconter notre histoire : « Même si elle paraît sale, elle fait partie de notre identité, il est important de parler et de casser les barrières. Elle montre aussi que derrière cette histoire se cache une leçon de vie qui nous instruit et qui nous permet d’avancer, c’est toute la beauté de l’œuvre. » Une beauté qui traversera le temps puisque ce grand costume sera conservé au Musée des îles pour rejoindre le panthéon des grands costumes.

 

Exposition La danse des costumes

Jusqu’au 13 janvier 2019

Du mardi au dimanche, de 9h à 17h

Musée de Tahiti et des îles

Tarifs : 800 Fcfp, entrée libre pour les étudiants et les moins de 18 ans

Renseignements : www.museetahiti.pf

 

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