N° 88 – De la fibre à l’objet

 Service de l’artisanat traditionnel – Te Piha Toro’a a te Rima’i

 

Rencontre avec les gagnants des concours du salon Noera a te rima’i.

Rédaction et photos : VH.

 

Les trésors du mois ont été découverts sur le salon Te Noera a te rima’i, qui s’est tenu du 6 au 24 décembre à Aorai Tini Hau. Il s’agit des premiers prix des concours qui ont mis en compétition les savoir-faire d’artisans des 5 archipels dans la réalisation d’une composition florale, d’un sautoir, d’une nappe et ses sets de table, ainsi que d’un tableau en vannerie. Une autre approche  de ce que l’on peut faire avec des fibres et matériaux locaux quand on a « l’art et la manière ».

 

Un « bouquet d’amour » en fibres locales

Antonina Temaiana (sur la photo) et Samuel Poareu ont gagné le premier prix du concours de composition florale en fibres locales avec leur « bouquet d’amour ». Haut de 80 cm et mesurant 40 cm de diamètre, ce bouquet est un mélange de tressage, de collage et d’assemblage de 14 fibres différentes, dont du kere, du pae’ore, du pae’ore teinté en jaune et en gris, de la racine de fara, du ni’au blanc, du ni’au frais, de la feuille de bananier, du raufara sauvage… Le résultat est un savant mélange du savoir-faire des îles Sous-le-Vent et des Australes. Monté sur un socle en bambou caché par du nape, le bouquet est parsemé de roses, la spécialité d’Antonina, de cœurs en ni’au tressé, de lianes pendantes et autres fleurs dont Samuel, originaire de Rurutu, maîtrise la technique. Deux jours de travail ont été nécessaires : le premier pour confectionner les fleurs et le deuxième pour assembler le bouquet.

 

Un sautoir entre terre et mer

Le premier prix du concours de sautoir a été remporté par Harold Haapii, originaire de Raiatea, avec une pièce originale. « Sur ce sautoir, on retrouve exactement 23 matières différentes, explique-t-il. J’ai utilisé 11 différents types de coquillages, du bois avec un tiki sculpté, de la nacre, 7 graines différentes issues des Marquises et des îles Sous-le-Vent, des vertèbres de requin, ainsi que 4 fibres différentes : l’écorce de purau, le pae’ore cuit, l’écorce de bananier et le ni’au blanc. Au niveau de la technique, j’ai utilisé le tressage et l’enfilage. Pour le concours, il fallait créer un sautoir inhabituel. C’est pourquoi j’ai souhaité mélanger les produits de la terre et la mer. »

Le rendu, représentatif des 5 archipels de la Polynésie, est le fruit d’une mure réflexion . « Pendant le concours, chaque participant est resté dans son domaine : les Tuhaa Pae avec le pandanus, les Marquises avec les graines… Et ne sachant pas vraiment comment représenter les îles Sous-le-Vent, parce que nous avons également toutes ces matières, j’ai pensé à toutes les regrouper sur ce sautoir ! »

 

Une nappe et des sets de table fleuris

Les lauréates du concours de couture sont Sheila Wohler (en photo) et Bernadette Tavanae, des spécialistes du tifaifai. Pour confectionner leur nappe de table ronde de 2,40 m de diamètre et les 8 sets de tables de 30 cm x 30 cm qui vont avec, elles ont eu l’idée d’un bouquet de fleurs central vu d’en haut. Sur un fond beige entouré d’une bordure verte, elles ont revisité la technique du tifaifai pa’oti (ou en applique) pour

composer leur bouquet avec des ‘opuhi rouge, des oiseaux de paradis roses et orange, des fleurs blanches de pitate (jasmin), des tiare tahiti jaunes ainsi que des feuilles de ‘ape (fougère) et d’Anthurium pour ajouter de la verdure. Chaque pièce de tissu, dessinée à main levée, a soigneusement été disposée de façon à obtenir un rendu symétrique.

Pour les 8 sets de tables, elles en ont fait 4 de couleur verte et 4 de couleur beige. Et sur chaque paire (une verte et une beige), on retrouve une des quatre fleurs de la nappe.

L’idée n’a pas seulement séduit le jury, car avant même la fin du concours, la parure avait déjà trouvé acquéreur.

 

Un tableau de Noël

Le concours de vannerie a porté sur la réalisation d’un tableau. Tamanee Alves (en photo) et Céline Vaihiatua, qui ont gagné le premier prix, ont nommé le leur « bouquet pour un dîner aux chandelles ». À partir d’un simple contreplaqué de 50 cm de largeur sur 40 cm de hauteur, elles ont déployé leur savoir-faire des Australes pour créer un tableau dans l’esprit des fêtes de Noël. Céline a commencé par couvrir le contreplaqué avec un tressage simple en pae’ore. Pendant ce temps, Tamanee réalisait un habillage, toujours en pandanus, mais avec la technique du moulin. Un tressage particulier et laborieux. En guise de cadre, elles ont appliqué une tresse à 4 en fibre de purau sur le pourtour. Pour décorer ce tableau, elles ont accroché un petit panier en pae’ore, recouvert de kere et rempli de tiges de fleurs. Ce mini-bouquet est composé à lui tout seul de plusieurs matières, comme l’écorce de bananier, la racine de fara, le kere ha’ari, la fibre de purau, la fibre de mautini ou encore le tapa des Marquises. Deux nœuds en pae’ore rappelant ceux des cadeaux de Noël ont été apposés ici et là. Enfin, pour continuer dans l’esprit de Noël, des grappes renvoyant aux boules qui ornent les sapins ont été disposées dans trois des quatre coins. D’un côté, des nacres en forme de fleurs suspendues à un lien en coquillages, de l’autre des penu en corail blanc qui pendent à des liens en ni’au blanc, et plus bas des graines de tamanu enrobées d’un fin tressage en moulin.

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