N°113 – « Le film documentaire a un pouvoir rare »

PHOTO SMA - G Semu

Stéphane Martin, président du musée du Quai Branly et président du jury du FIFO 2017.

 

Pour sa 14ème édition, le FIFO a demandé au président du musée du Quai Branly, Stéphane Martin, de présider ce festival pas comme les autres. Rencontre avec ce fin connaisseur du FIFO – il a fait partie du jury à 4 reprises – et de l’Océanie, heureux de faire partie de l’aventure.

Vous êtes un habitué du FIFO pour avoir fait partie du jury plusieurs années. Pour cette 14ème édition, vous revenez présider le Jury du festival, quel est votre sentiment ?

Un sentiment de fierté et aussi, bien sûr, beaucoup de plaisir. J’ai fait partie du jury du festival sous la présidence de grandes personnalités, Hervé Bourges puis Laure Adler : c’est une responsabilité de leur succéder !

Quel est selon vous le rôle d’un président de jury ?

De mon expérience passée, j’ai tiré le constat que le regard posé sur les films varie considérablement entre les membres d’un jury, en fonction de leur expérience personnelle, de leur origine géographique, de leur histoire… Le plus important me semble être de ne pas réduire la décision au plus petit dénominateur commun. Il faut sans doute laisser la réflexion mûrir pour arriver à distinguer les « perles » au sein d’une sélection qui est déjà très serrée.

 Qu’attendez-vous du FIFO cette année ?

Comme chaque année, j’attends de la sélection qu’elle surprenne le jury et les spectateurs, qu’elle émeuve, qu’elle interroge. Le film documentaire a un pouvoir rare, convoité, qui est de rendre le réel plus intelligible. J’espère que les films sélectionnés seront à la hauteur de cette responsabilité, essentielle à l’heure où de lourdes menaces pèsent sur la diversité culturelle et la préservation des écosystèmes.

Qu’est-ce qui vous a marqué lors des précédentes éditions ?

Le public du FIFO. En général, les festivals de films sont avant tout des rencontres entre professionnels. Les journalistes et les gens du métier y occupent l’essentiel de l’espace. A l’inverse, le FIFO offre de nombreuses opportunités d’échanges avec un public connaisseur, motivé, enthousiaste. Cela fait vraiment de ce festival un moment exceptionnel.

Selon vous, quelle est la définition d’un « documentaire océanien » ?

Le cinéma me semble un langage universel et je ne pas sûr qu’il y ait une définition valable du documentaire océanien. Il est en revanche certain que dans cette partie du monde, on regarde loin, on a l’habitude des grandes distances et une vision élevée de la planète. Je dirais que c’est un cinéma mondialisé au bon sens du terme.


Quel type de documentaire vous touche le plus ?

Sans doute ceux qui évoquent la transformation et la renaissance des traditions sous des formes nouvelles, dans le domaine de la famille par exemple, ou en matière artistique. Je pense notamment à la danse et aux arts décoratifs. J’aime aussi beaucoup les documentaires animaliers.

Un documentaire vous a t-il marqué dernièrement ?

Le musée du quai Branly-Jacques Chirac participe régulièrement à la production de documentaires autour de ses expositions. Je garde un souvenir particulier du documentaire réalisé à l’occasion de l’exposition « The Color Line. Les artistes africains-américains et la ségrégation », qui a permis de compléter de façon pertinente le propos de l’exposition.

Depuis des années, votre parcours est axé sur l’univers de la Culture, et notamment la culture polynésienne. Comment l’avez-vous découverte et qu’est-ce qui vous intéresse ?

J’ai découvert la Polynésie en effectuant mon service militaire sur un patrouilleur qui parcourait les archipels. J’avais une vingtaine d’années et les chocs que l’on éprouve jeune vous marquent pour toujours. Ce fut le cas pour moi, bien sûr. Quelque chose m’a ramené en Polynésie à intervalle régulier tout au long de ma vie. Je suis par ailleurs fasciné par l’histoire de la migration polynésienne : comment l’Homme, en quelques siècles à peine, a parcouru des distances aussi grandes, créant à chaque fois des entités culturelles originales et puissantes qui gardent un fort lien de cousinage. J’aime les voyages, la découverte d’horizons nouveaux, et la civilisation polynésienne me semble par essence celle de l’ouverture permanente à de nouveaux horizons.

Un message à nos lecteurs en attendant le festival ?

Qu’ils cultivent toujours leur curiosité pour l’ailleurs, pour les cultures et les contrées autres. Cela reste la meilleure façon de prendre la mesure de ce que l’on est, et finalement préserver ce que l’on a de plus précieux sans craindre l’ouverture au monde.

 

 

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