Rencontre avec Raymond Teeriierooiterai Graffe, prêtre de la cérémonie de la Marche sur le feu.

La marche ardente 

 

Ne manquez pas la 65ème édition cette année de la marche sur le feu, organisée par Raymond Teeriierooiterai Graffe à l’occasion des festivités du Heiva et suivant la logique du calendrier polynésien. Nous sommes en effet entrés dans le cycle Te tau matari’i i raro *, autrement dit la période de disette, dans laquelle la cérémonie du umu ti trouve son origine. On vous explique tout !

 

« La cérémonie du umu ti date des temps immémoriaux, explique Raymond Teeriierooiterai Graffe, le grand prêtre qui l’a remise au goût du jour en Polynésie à partir de 1983. Elle avait deux fonctions, poursuit-il : d’abord, se prémunir de la période de disette en faisant cuire dans un grand four des racines de ti**, qui se conservent des mois durant. Ensuite, on organisait une cérémonie autour de cette cuisson pour vérifier le pouvoir des prêtres. S’ils parvenaient à marcher sur les pierres ardentes, cela signifiait que les dieux et le mana étaient toujours avec eux. Les pierres chaudes peuvent atteindre plus de 2 000 degrés. Aujourd’hui encore, c’est la puissance des dieux qui nous protège ».

 

La préparation : une retraite spirituelle

 

Raymond le sait, il n’a pas le droit à l’erreur pendant la cérémonie mais surtout en amont de celle-ci : sa préparation est minutieusement calculée. Outre les « détails » logistiques – trouver 3 tonnes de bois, 10 mètres cube de pierres volcaniques, 200 feuilles de ni’au séchées, 200 troncs de bambous verts, assurer la surveillance durant les 25 heures de combustion, etc. – le tahu’a effectue une véritable retraite spirituelle. « Je me retire dans la vallée 72 heures pour méditer, jeûner, communier avec la nature et rendre hommage à mes ancêtres. Il n’y a qu’ainsi que je peux dompter le feu et permettre à la population de traverser la fournaise. En 65 cérémonies, il n’y a jamais eu un seul incident. C’est tout un art et je contrôle parfaitement la situation. » Le prêtre polynésien, qui a 68 ans aujourd’hui, sait aussi passer le relais aux jeunes, qu’il forme depuis plusieurs années pour prendre un jour sa relève. C’est d’ailleurs son fils, Arioi, qui dirige la cérémonie désormais. « Il n’y a qu’à Tahiti que l’on permet au public de nous accompagner à marcher sur le feu, c’est une expérience culturelle, spirituelle et physique unique. Je sais qu’autrefois, marcher sur le feu était une tradition dans de nombreux pays, mais les considérations religieuses ont changé et cela a disparu. Nous devons nous attacher à faire perdurer cette tradition chez nous. »

 

Le pouvoir du feu

 

« Le feu est un élément destructeur et de transformation qui a des bienfaits sur l’homme, explique Raymond Teeriierooiterai Graffe. L’énergie acquise durant ce cheminement sur les braises se transmet dans notre vie quotidienne et dans notre environnement ». Cette expérience ne comporte aucun risque, à condition de respecter quelques règles : il ne faut pas avoir bu d’alcool depuis la veille, les femmes qui ont leurs règles peuvent assister à la cérémonie mais ne doivent pas traverser le four, et il ne faut pas se retourner une fois que l’on a commencé à marcher sur la fournaise.

65ème marche du feu : pratique

– Mercredi 3 juillet, à partir de 18h00

– Mahana Park (Pk 18, Punaauia)

– Tarif : 3 000 Fcfp par personne. Vente des places sur le site à partir du 28 juin et jusqu’à la soirée.

– Renseignements : 78 54 75

 

* « Te tau matari’i i raro » (disette) s’installe de mai à novembre et « Te tau matari’i i ni’a » (abondance) de novembre à mai.

** Ti : Cordyline terminalis

 

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