Musique traditionnelle pau’motu

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Le patrimoine de la musique traditionnelle des Tuamotu est bien gardé… A la fin des années 20, le Bernice P. Bishop Museum envoie dans l’archipel une mission pour étudier la musique et les chants polynésiens. 600 textes sont collectés et 350 morceaux sont enregistrés entre 1929 et 1934. Des œuvres rares
qui nous renvoient à la sagesse de la culture ancestrale.

 Authenticité. C’est le premier mot qui vient à l’esprit lorsqu’on entend ces chants enregistrés il y a plus de 80 ans dans les lointains atolls des Tuamotu – Vahitahi, Fangatau, Reao et Napuka. On imagine sans peine les difficultés d’une telle entreprise, la patience de ces chercheurs qui recueillirent et notèrent ces musiques en parcourant les îles les plus reculées, munis de leur  enregistreur « Dictaphone » à cylindre de cire*.

Certains chants sont déjà empreints de l’influence chrétienne et d’harmonies occidentales tandis que d’autres paraissent surgir des tréfonds de ces femmes et ces hommes. Comme les « anau », ces lamentations, ou incantations, entêtante récitation davantage parlée que chantée sur un ton monotone, dans laquelle on ressent la puissance d’un monde aujourd’hui presque englouti. Généalogies, prières, légendes, on raconte les aventures de Tahaki, les exploits de ‘Oro et les pleurs de Hina après la mort de son époux Tiki. Mais il y a aussi des chants d’amour (teki, mereu, tirau), de travail – pour se donner du courage -, de combat (hurihuri vaka, haka, kihau) – pour affirmer sa force, de danse (putu, nihinihi, tirivara). Autant de structures mélodiques, de tonalités, de vocalises, de rythmes et de tempos qui ont été, lors de cette mission, répertoriés, classés, analysés… Il s’agit du seul travail de collecte de chansons qui ait été effectué dans les Tuamotu et a permis de léguer une partie de la mémoire musicale de cet archipel. Malheureusement, le grand public ne peut pas, à ce jour, avoir accès à ces œuvres pour des raisons de droit : le copyright appartient au Bernice P. Bishop Museum (90 ans à partir de la date d’enregistrement). En revanche, vous pouvez visionner une vidéo www.ica.pf/articles.php?id=282, où l’ethnoarchéologue Eric Conte présente aux habitants de Napuka des photos que Kenneth Emory avaient prises lors de sa dernière mission en 1934 : séquence émotion !

Une expédition pluridisciplinaire

La première expédition du Bishop Museum (1929-1931) était composée de Kenneth Emory, anthropologue, Clifford Gessler, journaliste et Franck Stimson, linguiste, qui plus tard a publié des traductions de certaines chansons. De cette première mission naîtra l’ouvrage « Native Music of the Tuamotus »** de E.G. Burrows qui analyse les résultats de cette collecte. Il y explique aussi la méthodologie de ce travail. De nombreux chants ont été transcrits avec une notation musicale européenne et une transcription réalisée à l’oreille, avec l’aide d’un diapason et d’un métronome. Les informations d’ordre ethnographiques liées à l’étude de ces chants provenaient des notes de terrain et des commentaires de Kenneth Emory et des traductions et notes de Franck Stimson.

Les enregistrements détenus par le Service de la Culture et conservés par l’ICA proviennent d’une seconde série d’enregistrements réalisés jusqu’en 1934 par Emory et Stimson à Papeete, Napuka, Vahitahi, Mangareva, Tatakoto, Fangatau et Reao.

* Le « Dictaphone » est un appareil destiné à enregistrer la voix. Le nom « Dictaphone » est une marque déposée par Thomas Edison. Les enregistrements s’effectuaient sur des rouleaux de cire.

** Bulletin du Bishop Museum n°119, 1933

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