Hiro’a n°157 – Trésor de Polynésie : Les coquillages de plage, un trésor pour Mareva Orbeck

Trésor de Polynésie

Service de l’Artisanat traditionnel (ART) – Pu Ohipa rima΄i

 

Les coquillages de plage, un trésor pour Mareva Orbeck

 

Rencontre avec Mareva Orbeck, artisane spécialisée dans le coquillage. Texte et photos : Audrey Duchein.

 

Créatrice depuis maintenant vingt ans, Mareva Orbeck est passionnée par son art. Son large panel d’ouvrages, des bijoux à la décoration, fait écho à la grande variété des coquillages de plage qu’elle emploie. S’apprêtant à diffuser sa belle énergie dans le cadre d’une formation dispensée, avec le Service de l’artisanat traditionnel, sur l’atoll de Anaa aux Tuamotu, elle nous a reçu dans son univers de bord de mer, chez elle à Teahupo’o, pour revenir sur son parcours qui l’a menée des hydrocarbures aux bijoux en passant par la couture.

 

 

Son histoire avec l’artisanat commence par un rêve. Celui de s’orienter vers la création, alors que son quotidien ne lui permet pas de se projeter dans le long terme : « À l’époque, je travaillais pour une société d’hydrocarbure et je ne voulais pas rester jusqu’à 55 ans derrière un bureau. Au début, je n’étais pas censée m’orienter dans les bijoux, je faisais de la couture. Je vendais de temps en temps grâce au bouche à oreille. » Puis elle part en vacances dans les îles, découvre la beauté des coquillages qu’elle ramasse sur les plages et confectionne des colliers qu’elle offre à ses amies. Encouragée par l’une d’entre elles, Mareva intègre une association d’artisanat pour vendre ses produits. « Je vendais mes couvertures en patchwork et mes couronnes de coquillages cassés. Malgré mon travail minutieux sur les dessus de lit, mes coutures faites à la main et de jolies associations de couleurs, les tarifs des premiers tīfaifai faits à la machine amenaient une rude concurrence. D’un autre côté, je voyais que mes couronnes de coquillages plaisaient et se vendaient facilement. » Mareva choisit alors de poursuivre dans cette voie et commence son aventure avec les coquillages de plage. « Il y a vingt ans, beaucoup d’artisans se moquaient de moi. Ils prenaient des coquillages vivants, qu’ils nettoyaient et vernissaient. Mais je préférais mes coquillages naturels. Tant pis si je n’étais pas sûre de les vendre, au moins je m’amusais ! »

 

Une filière du coquillage à valoriser

 

Cette passion pour les coquillages récoltés dans les îles se poursuit et l’amène à trouver de nouvelles manières de les assembler. « Je faisais des couronnes, des bracelets, des colliers à porter tous les jours et d’autres plus sophistiqués pour les cocktails. Puis j’ai commencé à m’orienter vers la décoration : miroirs, lampes, vases, boîtes à bijoux, rideaux… »

Mareva se fournit sur la plage devant chez elle, avec un pêcheur de Teahupo’o et reçoit des coquillages de l’atoll de Niau. « Aux Tuamotu, il est difficile pour les māmā de ramasser certains coquillages. Quand la houle est grosse, c’est dangereux d’aller sur le récif. Je travaille avec deux femmes de Niau, je ne leur demande pas de coquillages en particulier, seulement ceux trouvés sur les plages. Je les paye au moment de la commande, nous avons une relation de confiance. Je reçois chaque mois plusieurs cartons. À chaque fois, je suis impatiente de les fouiller pour découvrir ce que je vais pouvoir créer avec ! Très peu de personnes utilisent ces coquillages, alors qu’ils sont d’une grande beauté et faciles d’accès. »

 

La matière première comme source d’inspiration

 

Le coquillage de plage apporte authenticité et sobriété aux créations de Mareva. Son style lui permet de toucher une large clientèle. « Je prête parfois mes bijoux pour des séances photos. Mes créations s’associent facilement avec l’image des marques de surf et de maillots de bain, avec simplicité et légèreté. Ils fonctionnent aussi sur de belles robes de soirée. » Pour Mareva, la magie opère au moment du mariage et du placement de chaque coquillage.  « Ils sont tous magnifiques, ils ont été façonnées par la mer, leurs couleurs sont extraordinaires. Ce qui est difficile, c’est de trouver comment les assembler. Des fois, je me lève à deux heures du matin pour noter mes idées ! »

 

La créatrice est toujours enthousiaste pour se lancer dans de nouveaux projets. Elle souhaite partager cette envie avec les autres artisans. « Parfois je vois que certaines māmā ont peur d’abîmer leurs matières premières et leurs investissements. Mais il faut faire des essais, démonter, refaire, recommencer, jusqu’à trouver la bonne position pour le coquillage. Je n’ai pas peur d’abîmer mon nī’au et surtout j’aime prendre mon temps ! Je préfère commencer une création puis y revenir avec une nouvelle inspiration quelques heures ou jours plus tard. »

 

Les artisans de Anaa en formation

 

Le savoir-faire paumotu, notamment pour la fabrication de colliers en coquillages, est traditionnellement reconnu. Mais les autres archipels, en particulier les Marquises et les Australes, renouvellent en permanence leur champ créatif en alliant héritage et inspiration, technique et imagination. C’est dans cet élan que l’association Taatira’a a te Mau Vahine Ganaia de l’atoll de Anaa a fait appel au Service de l’artisanat traditionnel pour obtenir une formation. Leurs objectifs : se préparer aux futures expositions annuelles et offrir aux stagiaires la possibilité de faire carrière dans l’artisanat. Et c’est Mareva Orbeck qui a été choisie pour partager ses connaissances. « Je suis ravie que le Service de l’artisanat traditionnel me demande d’aller aux Tuamotu. Ils sont riches en matières premières, il y a tellement de choses à créer. ».. « C’est la première commune qui a fait cette demande et c’est avec grand plaisir que je m’y rends. J’espère leur transmettre ma passion pour les coquillages de plage qui sont encore très peu utilisés. Leur donner envie de faire des pièces originales, de développer la décoration. » Mareva ne cache pas son impatience à « découvrir tous les matériaux que nous pourrons utiliser sur place, le bois comme le miki miki que j’aime utiliser, le sable séché, les kere ha’ari… et les coquillages de plage bien sûr ! » Autant de perspectives prometteuse pour de prochaines expositions.

 

Pratique

Pour les formations contacter le Service de l’artisanat traditionnel

Renseignements : 40 545 400

www.artisanat.pf

 

 

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