Hiro’a n°154 – La culture bouge : Une rentrée marquée par le confinement

La culture bouge

Centre des Métiers d’Art (CMA) – Pu ha΄api΄ira΄a toro΄a rima΄i

Conservatoire artistique de Polynésie française (CAPF) – Te Fare Upa Rau

Rencontre avec Viri Taimana, directeur du Centre des métiers d’art, et Frédéric Cibard, chargé de communication du Conservatoire artistique de la Polynésie française. Texte : Lucie Rabréaud – Photos : CMA et CAPF

 

Une rentrée marquée par le confinement

La rentrée 2020-2021 ne ressemblera sans doute à aucune autre. Entre l’envie de relancer la culture et la formation, mais aussi l’incertitude d’une deuxième vague de Covid-19 et les mauvaises perspectives économiques, les établissements culturels naviguent à vue tout en restant optimistes et volontaires.

Au Centre des métiers d’art, le directeur donne le ton : « Rien n’est sûr avec la situation », soupire Viri Taimana. Déjà l’invitation des femmes peintres de Nouvelle-Zélande a été reportée à 2021 ou 2022, un événement à Hawaii se fera sans eux et, de manière générale, les déplacements ou invitations sont repoussés ou carrément annulés. Mais tout ce qui est prévu à Tahiti reste au programme. Et notamment ce projet autour du « livre pauvre », une idée de Flora Devatine. L’auteure s’était rendue à Sète en 2017 pour participer à un grand rassemblement de poètes et y a découvert le musée du Livre pauvre. Un livre pauvre est une création littéraire illustrée à quatre mains  : un auteur et un artiste. Il n’est pas édité, ni commercialisé dans le circuit classique, mais seulement fabri qué en quelques exemplaires, d’où son nom. Rentrée à Tahiti, Flora Devatine travaillera avec Viri Taimana pour créer un livre pauvre, exposé en 2019 à Sète. Puis l’idée est née de créer une bibliothèque des livres pauvres en Polynésie. Le CMA mène le projet avec l’association Littéramā’ohi. Les élèves et les enseignants du Centre des métiers d’art illustreront les textes des auteurs. Aucun thème n’a été imposé, chacun devra créer selon sa sensibilité et son inspiration. La quarantaine de livres pauvres qui en émergera sera exposée au CMA au moment du salon du livre en novembre. L’occasion pour les élèves de « vivre une expérience » et peut-être de se découvrir auteur ou illustrateur.

 

En quête d’une salle et de nouveautés

Viri Taimana espère mener un deuxième projet dès cette nouvelle année scolaire : l’ouverture d’une salle d’exposition permanente, en ville, pour y mettre « des choses invendables ». Aujourd’hui l’art contemporain souffre de n’avoir aucun espace permanent où exposer ses œuvres. Cette salle répondrait à ce besoin et plus encore : « Nous proposerons autre chose que ce que l’on trouve dans les galeries, des installations vidéo, des éléments en 3D, des robots qui s’agitent dans un coin… énumère avec le sourire Viri Taimana. L’espace pourra aussi accueillir des chanteurs, des performances d’artistes, des choses décalées. » Ce sera un lieu de bouillonnement culturel visible par le public et les touristes. « Je lance un appel aux propriétaires qui ont des bâtiments vides ! On aimerait ouvrir cette salle dès que possible. » Enfin, toujours pour la rentrée, il est question que le CMA soutienne la création d’une fondation pour la pirogue polynésienne et participe à ses projets de construction. Le projet est porté par Georges Estall. L’idée serait de permettre aux jeunes de retourner sur l’eau, d’apprendre à naviguer et, pour les élèves du CMA, de construire une pirogue traditionnelle tahitienne. « Mon pire ennemi, c’est l’ennui ! », explique Viri Taimana.

Du côté du Conservatoire artistique de la Polynésie française, c’est aussi la situation liée au Covid-19 qui est la principale préoccupation. « Beaucoup de familles mais aussi d’associations, d’écoles de danse, se retrouvent en difficultés financières. Le Conservatoire a pris des mesures pour permettre l’accès à ses salles à des tarifs très bas pour les professionnels et réfléchit à des modalités de paiement facilitées pour les familles », annonce Frédéric Cibard, chargé de la communication de l’établissement. Les mesures sanitaires seront prises pour rassurer le public et assurer la sécurité de tous.

Mais déjà la rentrée s’annonce, avec les trois jours de rencontres parents, élèves et professeurs qui se dérouleront les 19, 20 et 21 août et le début des cours, le lundi 24 août.

Une rentrée avec son lot de nouveautés, comme la création d’un chœur adolescents/jeunes adultes axé sur le répertoire polynésien : « La jeune génération doit se réapproprier sa langue maternelle, et ce chœur nous y aidera. »

Du côté des événements et des spectacles, la saison commencera comme toujours par le concert de la Paix, organisé avec le club Soroptimist le vendredi 25 septembre, à la mairie de Pirae, avec les étoiles de la danse traditionnelle, les lauréats et… l’esprit du jazz. Cet événement permet de lever des fonds, utilisés pour des bourses d’études offertes aux jeunes filles méritantes qui n’ont pas les moyens de se payer une inscription au CAPF.

Marae, opéra en reo tahiti, Ta’iri : des rendez-vous culturels préservés

La crise épidémique avait eu raison de plusieurs grands événements, comme le grand gala des arts traditionnels de juin ou encore les spectacles sur le marae Arahurahu de juillet : ces événements se dérouleront lors du second semestre de 2020.

Les trois premiers week-ends d’octobre, les samedis et les dimanches, Tere Ori, gagnant du Heiva dans la catégorie Hura Ava Tau en 2019, présentera son spectacle sur le thème de l’épreuve du ahimā’a (l’épreuve guerrière du four tahitien). Toujours au mois d’octobre, la compétition du Ta’iri Paumotu revient. Organisée en partenariat avec la Maison de la culture, elle se tiendra sur le paepae a Hiro le jeudi 8 octobre. Lors du concert de Noël des orchestres du Conservatoire, qui aura lieu au Grand théâtre le jeudi 10 décembre prochain, les spectateurs pourront voir et entendre, outre les mélodies dédiées à cette période de fête, de magnifiques extraits de l’opéra en langue tahitienne. Un projet de longue date, hélas annulé à cause du confinement. Autre report : le grand gala des arts traditionnels, qui devait se dérouler en juin, est prévu le 12 décembre à To’atā. Ce spectacle, écrit par Vaihere Cadousteau, présentera une lutte mythique entre deux dieux, Atea et Tāne.

Éducation et culture : de nouvelles collaborations

La rentrée 2020/2021 du Conservatoire artistique est également marquée par l’entrée de nouveaux établissements scolaires dans le dispositif des classes Cham-Chad, comme le lycée de Taravao et l’ouverture d’une antenne du Conservatoire au sein de l’école primaire de Teavaro à Moorea. C’est une nouvelle preuve du succès de cette scolarité aménagée, intégrant dans les cursus scolaires formels les arts classiques et les arts traditionnels pratiqués par des centaines de jeunes étudiants. Enfin, le Conservatoire poursuit son projet de recueil des rythmes polynésiens : un ouvrage devrait sortir lors de cette année scolaire. Et un « incroyable spectacle pop rock » est attendu pour le mois de mai 2021 au grand théâtre. Il mettra en avant les voix de divas accompagnées par les musiciens de l’orchestre symphonique.

Pour les amoureux de manga, une excellente nouvelle : l’ouverture d’une nouvelle classe de dessin consacrée certes aux mangas, mais des mangas s’inspirant de la culture et des mythes polynésiens !

 

CAPF : LA RENTREE PRATIQUE

  • Rencontres parents/professeurs et inscriptions définitives : les 19, 20 et 21 août
  • Mercredi 19, de 8h à18h, journée réservée aux réinscriptions
  • Jeudi 20 et vendredi 21, de 13h à 18h, journées ouvertes à tous
  • Rentrée et reprise des cours : le lundi 24 août 2020
  • Renseignements : [email protected],

[email protected] – Tél. : 40 501 414

www.conservatoire.pf

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