Hiro’a n°151 – Culture bouge : « La Mouette de Tchekhov », une réflexion sur le théâtre

Culture bouge

Conservatoire artistique de Polynésie française (CAPF) – Te Fare Upa Rau

Rencontre avec Christine Bennett, professeure de théâtre au Conservatoire artistique de la Polynésie et Soledad et Léo, élèves du cursus théâtre au CAPF. Texte et photos : Lucie Rabréaud.

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La Mouette de Tchekhov : une réflexion sur le théâtre

Pour leur spectacle de fin d’année, les élèves du cursus théâtre préparent la représentation de La Mouette de Tchekhov. Un huis clos poétique et émouvant qui est aussi une réflexion sur le théâtre, ses auteurs et ses acteurs.

 

En répétition cette fin d’après-midi, les élèves du cursus théâtre enchainent les scènes de La Mouette sous les yeux attentifs de Christine Bennett. La professeure de théâtre du Conservatoire artistique de la Polynésie française ne laisse rien passer et, comme elle le dit avec un sourire : ≪ Ce sont mes ados les plus avancés, ils sont en cursus 2, alors je leur demande beaucoup ! ≫ Exigeante mais toujours juste. ≪ Il y a une montée émotionnelle mais aussi cette douleur, ce trouble… Il faut que tu commences à penser comme une personne plus âgée. C’est plus insidieux ≫, explique-t-elle à une élève après une scène. ≪ C’est plus subtil ? ≫, interroge cette dernière. ≪ Oui ≫, répond Christine, toujours encourageante et en attente d’un travail émotionnel pousse. Après une autre scène : ≪ Tu triches, tu fais des effets d’actrice. Ce sont des gens torturés que vous interprétez, c’est l’opposé de ce que vous êtes. On recommence. Soyez vrais. Allez ! ≫ Les élèves écoutent et se préparent pour d’autres scènes. Le silence se fait et la répétition reprend.

Après quelques minutes, nouvelle interruption : ≪ Trop vite ! C’est pour ça que tu bafouilles. Tu te débarrasses du texte. Reprends. ≫ Pour les élèves du cursus théâtre, préparer la représentation de La Mouette de Tchekhov n’est pas simple.

Spleen, amour et humour

Ce huis clos dans une maison de campagne met en scène des personnages tortures dans une famille russe. ≪ C’est une réflexion sur les auteurs, les comédiens, le théâtre. Cette pièce correspond à ce qui s’est passé dans le théâtre russe : la fin d’une ère, le début d’une autre. On passe du théâtre classique a un théâtre moderne. Il y a beaucoup d’émotions et c’est très riche. ≫ Ce sont justement toutes ces émotions que les adolescents doivent appréhender et parvenir à interpréter. ≪ C’est difficile pour eux, mais c’est ce qui est intéressant. Il faut aller puiser profondément en soi, explique Christine Bennett. Il y a du spleen, de l’amour, de la passion, de l’affolement, de l’humour, de l’ironie… Mes élèves sont aussi en demande de ce genre de pièce. Et ils sont ouverts à toutes ces émotions, ils n’ont pas encore forgé leur carapace. ≫ Soledad et Leo font partie des élèves du cursus théâtre. Ils prennent des cours depuis quatre ou cinq ans et, effectivement, interpréter les émotions et les différents états d’esprit des personnages reste un défi : ≪ Ils ressentent plusieurs choses à la fois et c’est dur ! Mais c’est une grande satisfaction quand on arrive à faire une scène correctement. Il faut répéter et répéter encore. Ce sera acquis le jour du spectacle. ≫ Certains jours, les répétitions glissent toutes seules et d’autres, ils se heurtent aux difficultés. ≪ Christine nous aide à trouver la justesse ≫, explique Leo pour qui les choses viennent ≪ petit à petit ≫ et à force de travail. Soledad répète seule et s’enregistre pour mieux se rendre compte de son ton. Tous deux sont impatients de monter sur la scène du Petit théâtre.

Un cursus diplômant

Cette pièce de Tchekhov fait partie des classiques travaillés dans les conservatoires. Les adolescents ne seront pas les seuls sur scène, ils seront accompagnés par quelques adultes des autres classes de Christine et par le professeur de violon du Conservatoire qui se fera acteur et musicien. ≪ C’est un mélange d’acteurs assez rare. Ils s’entendent tous bien et il y a une belle énergie qui se dégage. ≫ Les répétitions ont commencé en janvier, après un premier semestre consacre à l’étude des contes du monde entier. Les élèves ont passé un premier examen sous forme de spectacle en décembre et leur travail sur Tchekhov sera aussi noté. Le cursus théâtre du Conservatoire et un enseignement rigoureux et sérieux, une formation initiale diplômante. Les élèves se forment au métier d’acteur, découvrent les textes, les auteurs, s’initient à l’art de la mise en scène, et approchent les différentes esthétiques. L’année prochaine, un cycle 3 est envisagé avec, au programme, étude de la culture et écriture théâtrale, travail chanté et expression corporelle. Pour Soledad et Leo, c’est une véritable passion. Ils n’envisagent pas d’en faire leur métier mais veulent continuer à jouer toute leur vie !

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