N°108 – Bientôt un guide touristique et culturel professionnel au parc naturel de ‘Öpünohu

Service de la Culture et du Patrimoine – Pu no te Ta’ere e no te Faufa’a Tumu2_Plan du site restauré

Rencontre avec Natea Montillier Tetuanui, responsable du bureau ethnologie du Service de la Culture et du Patrimoine.

 

Texte : MD. Photos : DR

 

La vallée de ‘Ōpūnohu fait actuellement l’objet d’un vaste projet de valorisation* initié par le Pays, la commune, les associations et d’autres partenaires. La commission du Pacifique sud et les fonds européens (programme INTEGRE) soutiennent ainsi l’embellissement de cet immense parc naturel de près de 1 500 hectares. A l’initiative du Pays, des guides professionnels seront prochainement formés pour conduire les visites.

 

Le programme « sentiers ethnobotaniques » actuellement en cours permet de réhabiliter d’anciens sentiers du domaine de ‘Ōpūnohu, mais aussi d’agrémenter la promenade d’un affichage de panneaux ethnobotaniques rédigés par le Service de la Culture et du Patrimoine : on y décrit la faune, la flore, quelques savoirs anciens ; c’est aussi un parcours de découverte archéologique. En ce moment même, quelques sites historiques de la vallée font l’objet d’une restauration alors qu’ils étaient reliés par des sentiers jadis très empruntés et permettant pour certains d’entre eux de passer d’une vallée à l’autre : le Service de la Culture et du Patrimoine a recueilli auprès de personnes sources les noms de « te ara tupuna, le sentier des ancêtres », celui qui commence à partir du parking et du marae Teti’irua pour aller vers trois complexes d’habitation à Tupauruuru – que le Service de la Culture et du Patrimoine avait déjà étudiés -, et qui revient par la plateforme des archers ; le 2e chemin, « ‘Aro’a Pu’uroa », est celui qui part et revient au marae Teti’irua, il croise « te ara tupuna » et atteint le point culminant Pu’uroa (col des 3 pinus) qui donne une vue d’ensemble sur toute la baie. « Le long de ces sentiers, les panneaux aideront à mieux apprécier les sites et leur environnement », nous con ait il y a plusieurs mois Caroline Vieux, coordinatrice du projet INTEGRE.

Le projet en est d’ailleurs actuellement à sa phase 2 : à l’accompagnement in- formatif des sentiers ethnobotaniques s’ajoutent de nombreuses activités rendues accessibles à tous. En parallèle de la finalisation de ces sentiers, le Service de la Culture et du Patrimoine souligne une manière ludique de découvrir les secrets de ces sentiers. Pour cela, rien de tel qu’un arata’i rātere : un guide professionnel. Qu’il soit guide de randonnée pédestre, touristique et culturel, lagonaire, d’excursions, personne-source, il est recommandé de faire appel à son service. Ce guide professionnel est le lien vivant avec les connaissances transmises depuis des générations. Natea Montillier Tetuanui, responsable du bureau ethnologie du Service de la Culture et du Patrimoine, prend pour nous la casquette de arata’i rātere pour nous conter ‘Ōpūnohu.

L’histoire de la vallée de ‘Ōpūnohu est riche

Depuis l’intérieur de l’ancien cratère, le arata’i rātere peut désigner les montagnes, les nommer et conter une légende qui s’y rattache. Il peut aussi raconter l’histoire des générations qui ont vécu dans la vallée. L’occupation du littoral entre 600 et 1000, puis de 1000 à 1650 par le ‘Āti-ro’o, un clan d’agriculteurs de Puna’auia, avant la suprématie de Mārama, chef venu de Ha’apiti. De 1650 à 1788, Tapuhutē et Fetu-nā-ni’a, conquérants des Îles-sous-le-vent, ont chassé le ‘Āti-ro’o et ont créé les villages Amehiti et Tupauruuru à ‘Ōpūnohu. Durant cette période, Mārama a gardé la suprématie sur le reste de l’île. Puis Māhine, grand chef de guerre du clan Mārama, a repris la vallée et a tenu tête à Māhau, placé par Tū (Pōmare I). En 1790, Māhine meurt à Atahuru et Tū devient alors ari’i nui de ‘Aimeho (Mo’orea). Dans la visite de cette vallée, les concepts de mana (pouvoir), tapu (sacré), ari’i (chef), tahu’a (spécialiste) prendront tout leur sens tant le lieu est chargé d’histoires et de symboles. Les nombreux vestiges appuieront la compréhension et c’est ainsi toute l’histoire de Mo’orea, qui s’appelait jadis ‘Ai-meho-i-te-rārā-varu en l’honneur de l’oiseau meho que l’on trouve encore mais di cilement à ‘Ōpūnohu, qui sera mise en lumière. meho, cet oiseau foncé qui se réfugie dans un trou de falaise ou dans les broussailles pour se cacher, sert de métaphore pour désigner les vaincus qui, lors des guerres à Tahiti, fuyaient à Mo’orea, car meho signifie aussi tāponi (se cacher). Mais il n’est pas toujours discret. Le meho crie souvent pour indiquer son territoire, notamment au crépuscule et à l’aurore. Pour les officiants du marae, les cris (hō) très variés et surprenants du meho étaient la voix des dieux. Autrefois, des sculptures d’oiseaux ornaient les unu (branche ou poteau sculpté pour offrande) sur le marae, et aussi, le faîte de la maison des chefs. Et avec toute cette végétation environnante, il sera facile de montrer comment et pourquoi les plantes sont utilisées, que ce soit dans un rā’au-fati (pour les fractures, les contusions), un rā’au-he’a (pour les « humeurs ») ou un rā’au-ira (pour les spasmes et fièvres).

Ainsi, même si le chemin est ponctué de panneaux informatifs, les visiteurs cèderont sans difficulté au plaisir de découvrir la visite avec un guide qui transmet la tradition orale, agrémente les savoirs reçus d’anecdotes de son vécu et transmet les notions de biodiversité, d’écologie, d’attachement à la terre, de travail communautaire, valeurs si chères à nos ancêtres.

Arata’i rātere e ta’ere māohi : guide touristique et culturel, un métier à part entière qui sera amené à se développer pour honorer les visites culturelles et ethnobotaniques de ‘Ōpūnohu. Hiro’a reviendra plus en détail sur ce projet de formation très prochainement.

 

 

 

* Voir les Hiro’a n° 64, n° 81 et n°99.

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