N°102 – « Le Centre des Métiers d’Art, c’est comme ma 2ème famille »

 

IMG_6261Raimere Teariki épouse Porlier, secrétaire néo-retraitée du Centre des Métiers d’Art

 

Après 36 ans de bons et loyaux services pour le Centre des Métiers d’Art, Raimere Teariki, 60 ans, a pris sa retraite. Employée depuis la création de l’établissement en 1980, elle a travaillé avec toutes les équipes et a mené ses missions avec rigueur et passion jusqu’au bout.

 Que faisais-tu avant d’entrer au Centre des Métiers d’Art ? 

J’ai obtenu mon BEP dactylographie et j’avais 19 ans lorsque j’ai commencé à m’occuper de la comptabilité de la société agricole et avicole de mon père. Nous sommes originaires de Papeari et mon père avait des terres à Taravao. Mais dès le départ, j’avais envie de travailler ailleurs parce que c’était aussi ma manière de prendre ma liberté.

Comment es-tu entrée au Centre ? 

A l’époque, quand je suis arrivée sur le marché du travail, j’avais trois propositions : l’éducation, la banque Socredo et le Centre des Métiers d’Art. J’ai opté pour le 3ème choix parce que j’ai toujours aimé ce qui était beau, et l’art c’est magnifique ! Quand j’ai commencé avec M. Henri Bouvier, on travaillait au conseil du gouvernement car le Centre avait été acquis par le Pays, mais il fallait faire des travaux. Donc, d’octobre 80 à mars 81, on travaillait déjà pour l’établissement nouvellement créé mais pas encore dans les bâtiments actuels. Quand on est arrivé ici, il y avait encore les ouvriers et on travaillait dans le bruit !

Quel était ton rôle au sein de l’établissement ?

On va dire que j’ai commencé par le bas de l’échelle. Au départ j’étais la petite main, je faisais parfois la plantonne, je rédigeais aussi les courriers et puis petit à petit j’ai appris à faire de la comptabilité. J’ai été aide secrétaire, aide comptable puis secrétaire de direction. Au fil des années, j’ai eu de plus en plus de responsabilités dans la gestion administrative du Centre.

Tu as vécu différentes périodes du Centre… que peux-tu dire à ce sujet ?

J’ai connu les quatre directeurs qui sont passés par le Centre. J’ai commencé avec Henri Bouvier, son créateur qui m’a recrutée. Ensuite il y a eu Tunui Salmon. Ce sont deux grands artistes. Et puis est venu William Ellacott, qui était davantage un administratif. Il m’a beaucoup appris au niveau des formalités et des procédures. En 2006 Viri Taimana est arrivé, qui est un excellent directeur. C’est un passionné, un intellectuel comme il en existe peu. Il m’a fait confiance et m’a laissé une certaine liberté dans mon travail grâce à ce que j’avais acquis. Parce qu’à 60 ans, si tu n’as rien acquis, c’est que tu n’as rien fait !

Qu’as-tu justement acquis au fil de ta carrière ? 

La persévérance, le courage et la détermination. Les dernières années de ma carrière, j’ai beaucoup consacré ma vie à mon travail car mes enfants avaient grandi et j’avais plus de libertés avec Viri. J’ai mis les bouchées doubles en prenant toujours du plaisir dans mon cadre de travail. D’autant plus que le Centre a relevé de nouveaux défis ces dernières années, avec l’usage des nouvelles technologies comme outils en faveur des jeunes artistes. Je suis contente d’avoir pu participer à cela sur la fin de ma carrière.

Avec ton ancienneté au sein du Centre, tu as vu défiler les générations… 

C’est vrai, j’ai vu défiler des centaines d’élèves. Il m’est arrivé de les croiser et souvent ce sont eux qui me reconnaissent. Aujourd’hui, ils sont parents et sont parfois repassés au Centre pour récupérer leur attestation de réussite. C’est comme ça que j’en recroisais beaucoup parce qu’à l’époque, on accueillait les élèves à partir de 14 ans donc j’ai vu des élèves très jeunes que je n’ai pas reconnus plusieurs années après.

Qu’est ce que tu as pu apprendre sur l’art au cours de ta carrière ? 

J’avoue que je n’avais pas beaucoup de temps libre pour me consacrer à l’art à proprement parler. J’avais surtout des tâches administratives mais grâce à mon environnement de travail, j’ai pu apprendre certaines choses basiques. Désormais, je sais reconnaître les différents styles selon les archipels. J’ai aussi appris quelques caractéristiques sur les arts du Pacifique. Tout au long de ma carrière, j’ai toujours eu l’occasion de cultiver ma sensibilité par rapport à l’art grâce à ce que je voyais dans l’établissement.

Qu’as tu ressenti au moment de prendre ta retraite ? 

J’avoue que ça m’a fait tout drôle parce que mon dernier jour était un vendredi et le samedi, je me suis levée en me rendant compte que ces 36 années au travail étaient derrière moi. Ça m’a fait un pincement au cœur parce que c’est difficile de se poser après tant d’années. J’ai côtoyé des gens formidables au centre.

Quels sont tes projets à moyen terme ? 

Profiter de ma retraite ! Je vais retourner à Papeari, ma commune d’origine où j’ai construit sur un grand terrain. J’ai planté beaucoup de fleurs, comme des tiare tahiti, des tipanie, des fougères, du moto’i et des ‘opuhi notamment. Je vais m’occuper de toutes ces plantes pour pouvoir me consacrer à ma passion : confectionner des couronnes de fleurs. J’aimerais bien aussi faire mon petit potager et prendre des cours de couture pour pouvoir réaliser de petits vêtements pour ma mo’otua.

Un message pour le Centre et tes anciens collègues de travail ? 

Un grand fa’aitoito. Ce mot tahitien a beaucoup de sens. Il signifie bonne continuation et donne une énergie positive. Bon courage : c’est tout ce que je souhaite à mes anciens collègues. Tous les jeunes qui sont au Centre également ou qui souhaitent y être, restez motivés et déterminés, cela paiera.

 

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