N° 80 – Que sont devenus les médaillés d’or du Conservatoire ?

Rencontre avec les médaillés d’or du Conservatoire et Fred Cibard, attaché de direction au Conservatoire.

La médaille d’or* est la distinction la plus haute décernée par le Conservatoire Artistique de la Polynésie française. En ‘ori tahiti, ils sont une vingtaine à l’avoir obtenue depuis 1992. Hiro’a est allé à la rencontre de six d’entre eux, afin de découvrir ce qu’ils sont devenus et ce qu’ils ont fait de ce gage d’une excellente maîtrise de la discipline.

 

• Vanina Ehu

Professeur de ‘ori tahiti au Conservatoire, Vanina Ehu est la toute première médaillée d’or de l’établissement. Elle l’a obtenue en 1992. « En même temps que j’enseignais, j’apprenais avec Mamie Louise. Je suis arrivée au Conservatoire en 1989, à 21 ans, et je ne savais pas danser », dit-elle avec humour. Mais depuis, c’est elle qui prépare les élèves à passer leurs examens de danse. En un peu plus de 20 ans, elle a formé et vu évoluer trois générations de danseuses. Reconnue dans le milieu de la danse, Vanina est membre du jury du Hura Tapairu depuis sa création. Elle a également été membre du jury au Heiva i Tahiti, et pour l’épreuve du baccalauréat.

 

• Vaehakaiki Urima

C’est par son petit nom, « Moon », que tout le monde la connaît. La danse, chez elle, c’est une histoire de famille. « J’ai fait le Conservatoire parce que je n’avais pas trop le choix !, confie-t-elle en riant. Mamie Louise est ma vraie grand-mère et elle m’a un peu jetée dans la marmite de la danse ! J’ai fait mon premier show à la Maison de la Culture à 3 ans à peine. » Sa médaille d’or, elle l’a obtenue en 2000, à 17 ans. Et tout de suite après, elle partait en tournée avec le groupe Te Maeva aux Etats-Unis, où elle a donné son premier workshop. Depuis 2005, elle est professeur au Conservatoire et sourit à l’idée qu’un jour, « ça va être moi la vieille qui vais reprendre le flambeau de mamie Louise ». Mais avant cela, elle a décidé cette année de se lancer un défi en montant son groupe de danse, Toahiva, qu’elle prépare pour le concours du Heiva i Tahiti 2014.

 

• Erena Uura

C’est à l’âge de 25 ans qu’elle entre au Conservatoire. D’abord en formation avec mamie Louise, elle a ensuite entamé un cursus de 12 ans, qu’elle a terminé en 2010. « J’ai commencé comme les bébés, alors que j’étais plus âgée, raconte-t-elle. L’examen de la médaille d’or, je l’ai passé deux fois. Le jury est intransigeant, et ils ont raison d’ailleurs parce qu’il faut la mériter. » Mais Erena n’a pas attendu sa médaille pour s’impliquer davantage dans la danse, puisqu’elle est également professeur au Conservatoire depuis 2005. Après l’avoir obtenue, elle a dispensé des cours au Japon pendant 8 mois, avant de revenir se consacrer à l’enseignement au sein de l’Etablissement. Véritable passionnée, elle participe régulièrement au Heiva ou au Hura Tapairu, avec le groupe Hitireva notamment, au sein duquel elle assiste parfois Kehaulani Chanquy.

 

• Hinatea Ahnne

« J’ai commencé à danser à l’âge de 5 ans, et j’ai toujours dansé, évolué et grandi artistiquement auprès de Vanina et mamie Louise, qui pour moi est la Bible de la danse », confie-t-elle avec une pointe de nostalgie. L’année où elle a passé son examen, 2001/2002, a été très riche culturellement. « J’ai dansé avec Matato’a, j’ai participé à mon premier Festival des arts du Pacifique à Nouméa, et c’était également l’année où je passais le bac. Ça a été un dilemme pour moi et surtout pour mes parents parce que je me préparais davantage à l’examen de la médaille d’or qu’à mon bac. Mais au final j’ai eu les deux ! » Après sa médaille, elle a commencé à danser avec Temaeva, jusqu’à devenir chorégraphe pour les spectacles des tournées en 2003 et 2005 aux Etats-Unis. En poursuivant ses études à Bordeaux, elle n’a pas pu résister à l’appel de sa culture en montant un groupe de danse avec d’autres étudiants. De retour à Tahiti, elle met la danse en stand-by avant de reprendre de plus belle en œuvrant au sein de Hitireva pour le Hura Tapairu et le Heiva. En 2012, elle monte son association culturelle, Hiva, avec des anciens du Conservatoire, pour fouler les planches du Hura Tapairu. « Cette année, j’ai relancé une autre version de Hiva, en version école de danse, avec Hinavai Raveino. Le challenge que je trouve dans la création de cette école de danse, c’est la mise en avant des diplômés du Conservatoire, parce que je ne veux m’entourer qu’eux d’eux. »

 

 

ENCADRÉ

Les médaillés d’or

 

1992 : Vanina Ehu

1998 : Vairani Drost et Heiti Teiva

2000 : Kelly Terorotua et Vaehakaiki « Moon » Urima

2002 : Hinatea Ahnne et Vaihere Cadousteau

2003 : Joëlle Berg

2005 : Kahaia Puhetini

2007 : Teruria Taimana

2010 : Erena Uura

2011 : Vaihere Doudoute

2013 : Hugues Oopa, Amandine Tchoun Kong Sam, Marama Amaru, Poura Legayic

 

 

* Officiellement, la médaille d’or n’existe plus. Elle a été remplacée en 2002/2003 par le DET, Diplôme d’Etudes Traditionnelles. Mais la direction du Conservatoire pense reprendre cette appellation l’année prochaine. Le DET est validé si et seulement si les candidats ayant obtenu leur dominante danse valident également trois unités de valeur dont l’unité centrale, la culture générale polynésienne, obligatoire.

 

 

encadré

Heimaire et Taiana, élèves de ‘ori tahiti, à l’assaut du Diplôme d’Etudes Traditionnelles !

 

Cet événement, tous les élèves de haut niveau de Te Fare Upa Rau le craignent et l’attendent à la fois : quand vient la fin du cursus d’études traditionnelles du Conservatoire vient également le moment du fameux passage devant le grand jury de l’établissement. C’est la dernière étape à franchir pour obtenir  la dominante « danse » du diplôme des études traditionnelles, le D.E.T. Ce diplôme  remplace la célèbre médaille d’or depuis l’année 2002/2003. Il ne peut être obtenu qu’avec une note supérieure ou égale à 17/20. Le compte à rebours a débuté depuis janvier, car la date d’examen a été fixée au mercredi 21 mai prochain.

 

L’heure de vérité, l’heure de la passion

 

Deux épreuves sont inscrites à l’examen de danse : une épreuve imposée et une création chorégraphique. L’épreuve imposée invite l’élève à montrer sa connaissance des pas et des mouvements, des techniques de base et de la maîtrise de l’espace. La chorégraphie libre, agrémentée d’un mémoire, pousse l’élève à faire preuve de son pouvoir d’invention, à « danser » son histoire. Si cette épreuve est l’une des plus redoutables que l’établissement propose à ses élèves, c’est aussi la plus belle : il est question de décrocher son diplôme de fin d’études et de valider des années de pratique, souvent plus de 10 ans passés au sein de la grande famille du Conservatoire. Âgées respectivement de 20 et de 21 ans, Heimaire Opeta et Taiana Mahinui ont patiemment franchi toutes ces étapes, c’est-à-dire trois cycles de trois années plus un an. Elles ont participé à chaque moment de la vie du Conservatoire, aux Galas et aux journées portes ouvertes, elles ont vécu le superbe spectacle donné en l’honneur du départ de Mamie Louise Kimitete et elles ont accueilli, lors de leurs cours de chorégraphies, les petites danseuses qui suivront un jour leurs pas. Heimaire et Taiana savent par ailleurs que pour obtenir leur diplôme, elles devront également valider trois unités de valeur avec la culture générale polynésienne en tant qu’épreuve obligatoire. Les deux jeunes danseuses se présentent à cet examen, comme leurs aînés, avec les mêmes craintes et les mêmes espoirs. En cas de succès, elles pourront à leur tour transmettre ces connaissances durement acquises, sachant pertinemment que la pratique de la danse professionnelle est une autre histoire, une autre aventure, et que le diplôme est surtout un passeport attestant de leur rigueur et de leur courage dans l’effort, ainsi que de leur potentiel de créativité.

 

 

ENCADRE

Les élèves des classes de musique de chambre* passent aussi l’examen

 

La musique de chambre est une discipline complémentaire pour les élèves de fin de deuxième et troisième cycle au Conservatoire. Elle est encadrée par deux professeurs : Simon Pillard, professeur de violoncelle, pour les formations intégrant les instruments à cordes, et Guillaume Dor, professeur de trompette, pour les formations comportant les instruments à vent. Les élèves des classes de musique de chambre ont passé leur audition, sous forme d’un concert ouvert à tous, le mercredi 30 avril dernier, au grand auditorium du Conservatoire.

 

 

* La musique de chambre est faite pour être jouée dans les salons, à la différence de la musique d’église ou de théâtre. Le public étant réduit, elle privilégie les duos, trios, quatuors et quintettes (violons, alto, violoncelle).

 

 

 

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