N° 79 – La lumière de Gouwe

Musée de Tahiti et des îles – Te Fare Manaha

 

Rencontre avec Theano Jaillet, directrice du Musée de Tahiti et des îles et co-commissaire de l’exposition « Après Gauguin ».

 

« À Tahiti, je me suis senti renaître, j’ai tout recommencé », écrivait en 1937 Adriaan Herman Gouwe, à un correspondant en Hollande. Peintre majeur de la peinture polynésienne des années 1900, Gouwe a su rendre par les couleurs la puissance de la lumière insulaire, le mystère profond de ses habitants. Découvrez ici deux de ses œuvres qui font parties de l’exposition « Après Gauguin ».

 

Adriaan Herman Gouwe arrive en 1927 à Tahiti à l’âge de 52 ans, et s’impose rapidement comme un des peintres majeurs de l’île. Sa peinture s’oriente d’abord vers une quête de lumière. Dans ses paysages, il ne recherche pas l’harmonie de la nature, mais plutôt son aspect dramatique. Gouwe connaît le succès comme portraitiste à Tahiti avec de nombreuses commandes de fonctionnaires. Parmi les thèmes qu’il traite tout au long de sa vie tahitienne, on trouve paysages, portraits, scènes de bal, scènes de la vie quotidienne (porteurs de fe’i, pêcheurs). Il exprime en général dans son œuvre la force de la nature polynésienne, l’éclat lumineux et le mystère de la Polynésie et des Polynésiens.

 

Du trait…

 

Dans le dessin au fusain conservé au Musée de Tahiti et des îles, on entend presque les chants et les cris des danseurs évoluant dans le mouvement des flammes et l’obscurité de la nuit tahitienne. Les acteurs de la scène dansent en cercle, brandissant des branches enflammées tandis que les musiciens installés à côté font résonner les pahu. Cette œuvre est le travail préparatoire pour l’huile sur toile reproduite ici et qui présente les mêmes silhouettes en mouvement dans la lumière cette fois, et l’éclatement de la couleur.

 

… à la couleur

 

La composition est directement reprise de l’étude au fusain. Dans le fond se détachent les figures féminines et sinueuses qui étaient tout juste esquissées sur le dessin. Les corps des hommes sont tendus et parfois anguleux, contrastant en cela avec les ondulations des danseuses qui rappellent le mouvement des flammes. Les danseurs sont ici porteurs de lumière, au sens propre comme au figuré. La couleur, la lumière, le mystère, si chers à Gouwe, s’entremêlent dans cette scène de danse.

 

On retrouve dans ses œuvres la « vie en plein air mais cependant intime », « ces couleurs fabuleuses, cet air embrasé, mais tamisé, silencieux »*, que Paul Gauguin évoquait déjà dans ses écrits. Les tableaux de Gouwe qui sont présentés dans le cadre de l’exposition « Après Gauguin » en offrent une nouvelle illustration.

 

 

* Extrait du recueil Diverses choses, de Paul Gauguin.

 

Adriaan, Herman GOUWE

 

1875 – 1965

 

Né à Alkmaar, dans la Hollande septentrionale, il fait ses études à l’École des arts et métiers d’Amsterdam. Puis il obtient le premier prix du concours de Rome et s’y installe avec sa femme. Il fait des voyages en Italie, en Espagne, au Maroc avant de rentrer à Amsterdam où il se sépare de sa femme. Il effectue de nombreux séjours à Gulpen, au Limbourg, site de nombreux peintres et fait une première exposition en 1907 au Stedelijk Museum d’Amsterdam. Il passe sous contrat du collectionneur Regnault et se spécialise dans la peinture animalière. En 1927, il voyage en Provence et lit un article enthousiaste sur les Mers du Sud. Il décide alors de partir pour Tahiti, arrive à Papeete en décembre et s’installe sur la côte est. Il fait de nombreux portraits et déménage en 1930 à Raiatea, puis à Taha’a où habite son ami peintre van der Kerckhoven. De retour à Raiatea, il exécute les plans de sa maison-atelier à Hanua. En 1935, il fait sa première exposition à Papeete, au Cercle Bougainville. Lors d’un voyage à Fakarava, il se lie d’amitié avec Francis et Lisa Sanford. En 1940 a lieu une nouvelle exposition au Cercle Bougainville. Il fait de nombreux séjours à Bora Bora chez les amis Sanford. Opéré en 1958 de l’œil droit, il connaît de sérieux problèmes de vue. En 1959, il fait un retour en Hollande et reprend le bateau en septembre pour la Polynésie. Sa vue est extrêmement affectée. Sa dernière exposition a lieu en 1960 à l’Hôtel Stuart. Il s’installe à Titioro et s’éteint dans la nuit du 28 décembre 1965, après une vie entièrement consacrée à la peinture.

 

 

LÉGENDES

 

Adriaan Herman GOUWE

fusain sur papier

Collection du Musée de Tahiti et des Îles – Te Fare Manaha

n°inv: D 2004.10.1

 

Adriaan Herman GOUWE

huile sur toile

Collection du Musée de Tahiti et des Îles – Te Fare Manaha

n°inv: D 2004.10.2

 

Pratique

 

L’exposition « Après Gauguin » se tient jusqu’au samedi 24 mai dans la salle d’exposition temporaire du Musée de Tahiti et des îles.

Ouvert du mardi au samedi de 9h à 17h.

Entrée : 600 Fcfp / gratuit pour les scolaires et les étudiants.

+ d’infos : 54 84 35 – www.museetahiti.pf et sur Facebook : Musée de Tahiti et des îles – Te Fare Manaha

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