Rencontre avec Miriama Geoffroy, coordinatrice du FIFO, et Benoît Hické, programmateur du Museum National d’Histoire Naturelle de Paris.

Le FIFO, d’îles en villes

Depuis 2008, le FIFO poursuit ses tournées « Hors les Murs » aux quatre coins des archipels polynésiens, mais aussi à l’occasion d’évènements régionaux et internationaux. Le festival, reconnu pour la qualité de sa sélection, fait battre le cœur de l’Océanie de Maré à la Nouvelle-Zélande en passant par Paris, où le Museum National d’Histoire Naturelle lui a consacré, début juin, un week-end spécial.

Tous les ans depuis 6 ans, près de 6 000 personnes en Polynésie peuvent découvrir chez eux les meilleurs films de l’édition du FIFO qui vient de s’achever. Des projections qui sont l’occasion, pour les participants, d’être acteur et spectateur des réalités océaniennes.

« Cette année, petite nouveauté, les projections dans les îles ont lieu en mai, et non plus en septembre comme c’était le cas depuis la création de l’événement, pour répondre aux demandes des établissements scolaires », explique Miriama Geoffroy, coordinatrice du FIFO. Rangiroa, Nuku Hiva, Hiva Oa, Ua Pou, Taravao, dans les écoles ou sous forme de projections publiques dans les différentes communes, les organisateurs du FIFO apprécient d’aller à la rencontre d’un public enthousiaste et curieux qui porte un regard nouveau sur les films, entraînant des débats particulièrement riches. Pour la première fois cette année également et à l’initiative du personnel d’encadrement de la prison de Nuutania, une projection sera proposée aux détenus.

« Ces opérations Hors les Murs sont devenues réalité grâce aux établissements scolaires, aux communes, mais aussi aux associations et aux bénévoles qui sont le relais du FIFO dans les îles, indique Miriama. Un partenariat a été mis en place pour ces opérations avec  le groupe EDT-GDF SUEZ, qui finance depuis le début les déplacements et met au service du FIFO son réseau dans les îles pour l’organisation des projections. Un partenariat précieux, car ce type de déplacement a un coût que l’association du FIFO a de plus en plus de mal à supporter. »

Sur les écrans d’ailleurs 

Grâce à la venue lors du précédent FIFO de plusieurs représentants de festivals de la région ou de métropole, les films de la sélection 2013 ont été présentés en mai et en juin au sein de festivals partenaires du FIFO, ou durant des « Hors les Murs » menés en partenariat avec le festival.

Entre mai et juin, le FIFO a donc investi les écrans du festival de Maré, en Nouvelle-Calédonie, de celui de Rochefort Pacifique et Etonnants Voyageurs en France, mais aussi du Wairoa Maori Film Festival, en Nouvelle-Zélande*.

Le FIFO a également mené sa barque au Museum National d’Histoire Naturelle (MHN) de Paris, les 1er et 2 juin, lors d’un week-end spécialement dédié au festival et à l’Océanie. Benoit Hické, programmateur du MHN, était présent au 10ème FIFO pour faire une sélection parmi les 34 films en et hors compétition. Cinq documentaires ont été proposés au public Parisien : « ‘’Stori Tumbuna’’, mon coup de coeur de la programmation 2013 du FIFO, avoue Benoît Hické. J’ai bien aimé le côté excentrique de ce documentaire, qui nous montre un homme en train de se filmer, avec tous les questionnements techniques que cela suppose, la valeur des plans et la question du regard de l’ethno-musicologue débordé par l’empathie. J’ai également choisi ‘’Chân Dang’’, un documentaire sur l’histoire méconnue des Vietnamiens de Nouvelle-Calédonie. C’est une œuvre sur la mémoire, le souvenir, les retrouvailles, très émouvant. Dans un contexte où la migration des personnes redevient un enjeu politique majeur, il me semblait important de montrer une autre histoire, d’autres parcours, d’autres perspectives, qui permettent de retrouver un peu de bonté d’âme », explique le programmateur du Museum. De poursuivre : « le documentaire ‘’Les cannibales du Pacifique’’, programmé lors de ce week-end, est intéressant car il déjoue les codes, on y découvre la manière dont les natifs de Futuna se livrent à une sorte de reconstitution historique à des fins économiques. Quant à ‘’Canning paradise’’, il évoque un pays ignoré en Europe, la Papouasie Nouvelle-Guinée, et le véritable scandale de la pêche excessive du thon, qui remet en perspective les problématiques de la mondialisation à une échelle insoupçonnée. Enfin, ‘’Aux enfants de la Bombe’’, un film édifiant sur les essais nucléaires en Polynésie française, qui ont été très souvent documentés, mais qu’on redécouvre là à l’échelle d’un individu, et de la manière dont il a cru au miracle du développement atomique, un miracle qui a causé sa perte. Les documents d’archives exhumés par les deux réalisateurs nous replongent dans cette histoire et c’est passionnant. » Un panel de problématiques vaste et original révélant l’Océanie avec beaucoup de profondeur.

Une table ronde « Océanie, histoire et enjeux » a également été organisée, qui réunissait des intervenants exceptionnels tel que Maurice Godelier, directeur d’études à l’EHESS**, spécialiste de l’Océanie et de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, Christian Coiffier, anthropologue, chargé de mission au musée du Quai Branly, Benoît Trepied, chargé de recherches au CNRS spécialiste de l’Océanie, ainsi que Christine Bonnet et Jean-Philippe Desbordes, les réalisateurs de « Aux enfants de la bombe ».

Le FIFO sera enfin, comme le veut la tradition désormais, sur les écrans Festival du Film Romantique de Cabourg (12 au 16 juin), dans la catégorie « Fenêtre sur le Pacifique ». C’est « Aux enfants de la bombe », Grand prix FIFO-France Télévisions 2013, qui sera proposé au public.

Toutes ces projections permettent de faire rayonner le FIFO, et à travers lui l’Océanie et ses spécificités. Fort du succès de cette année, le FIFO organisera donc lors de sa prochaine édition une « table ronde des festivals de films océaniens », qui permettra de regrouper tous les organisateurs de ces festivals, afin d’optimiser les partenariats et de faire voyager les films dans la région.

+ d’infos

www.www.fifo-tahiti.com / Facebook : FIFO Tahiti / Twitter : twitter.com/fifo_tahiti

* Maré : du 31 mai au 2 juin, Rochefort : du 8 au 12 mai, Etonnants Voyageurs (Saint-Malo) : du 18 au 20 mai, Wairoa Maori Film Festival : du 30 mai au 2 juin.

** EHESS : Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales.