« La culture est dans la diversité » – Mai 2012

10 questions à…

 

Belinda Bambridge

 

« La culture est dans la diversité »

 

Il était une fois une petite fille venue d’un lointain atoll des Tuamotu, qu’elle a quitté pour suivre sa scolarité à Tahiti. Une femme devenue professionnelle des ressources humaines, investie dans l’avenir de son archipel autant que dans la politique locale. Voici Belinda Bambridge. Mettre quelque chose dans l’intro par rapport au festival des tuamotu, pour qu’on comprenne le sens de cette interviw.

 

Parle-nous de ton parcours…

Ma maman est originaire de Tatakoto, où j’ai grandi, élevée par mes grands-parents. A 7 ans, j’ai du aller sur Papeete pour continuer l’école. Ca a été un choc ! Moi qui n’avait baigné durant ma tendre enfance que dans la culture pa’umotu, avec comme distractions la cocoteraie et l’église. Cela ne m’a pas empêchée de m’adapter à la vie « urbaine » de Tahiti. J’ai commencé à travailler dans l’administration assez jeune, passé mon baccalauréat à 34 ans, puis les concours : aujourd’hui, je suis attachée d’administration à la DGRH (Direction Générale des Ressources Humaines).

 

Tu fais partie de l’association Te Reo o te Tuamotu, tu avais besoin de t’investir pour ton archipel ?

Oui, absolument. Cela fait une dizaine d’années que j’ai rejoint l’association. Nous faisons la promotion des spécificités des langues, de la culture, des traditions et de l’état d’esprit des différents atolls des Tuamotu, notamment à travers l’organisation d’évènements comme le Festival des Tuamotu, qui aura lieu du 11 au 13 mai à la Maison de la Culture. Nous sommes également à l’origine de la création de l’Académie Pa’umotu.

 

Tu es également conseillère municipale à la mairie de Punaauia : en venir à la politique était une suite logique de tes implications professionnelles et associatives ?

Je crois en la politique et aux changements qu’elle peut amener. Je sais que la machine est lourde mais je suis tenace, honnête et force de propositions. Il y a une certaine satisfaction à se sentir utile.

 

Quel est ton rôle dans l’organisation du Festival des Tuamotu ?

J’encadre la chorégraphie d’ensemble pour l’élection des Tapairu et Tamatika (Miss et Mister). J’ai moi-même dansé pendant des années dans le groupe Temaeva, mais là il s’agit de souligner les particularités des Tuamotu. Je travaille auprès des anciens pour retrouver les pas, la musique, etc.

 

La transmission opère toujours ?

On fait comme on peut, mais l’implication des anciens est très forte : certains viennent exprès à Tahiti pour les répétitions du festival afin de nous aider. Ca leur tient à cœur de nous transmettre leur savoir.

 

Tu es fière d’être des Tuamotu ? Il n’y aurait pas une autre question ou formulation ?

Oui, mais comme je serais fière d’être des Australes ou des Marquises. L’important, selon moi, étant de se sentir bien dans sa peau. Peu importe d’où l’on vient, du moment que l’on respecte les différences.

 

Entre le réchauffement climatique et la mondialisation, comment vois-tu l’avenir de l’archipel ?

Aujourd’hui, je crains les esprits tournés vers le profit et l’individualisme, entraînant invariablement la perte des valeurs, du mode de vie, des traditions, de la transmission… Je souhaite que les jeunes pa’umotu puissent trouver leur équilibre dans et en dehors des atolls. Toute la difficulté réside dans cette ambivalence. Il est naturel de vouloir partir, mais encore faut-il avoir les capacités de s’adapter ailleurs. Tout comme il est naturel de vouloir revenir, mais sans imposer son changement…  Peut-être que les atolls vont se dépeupler toujours plus, peut-être même qu’ils vont disparaître un jour sous les flots, mais je ne peux pas changer le cours des choses, empêcher les grosses usines internationales de polluer ! Etre impuissante me révolte !

 

Il n’y pas de solution selon toi ?

Pour certains problèmes, non. Pour d’autres, j’essaye d’agir à mon échelle. Avec l’association Te Reo o te Tuamotu d’une part, nous rassemblons toutes les bonnes volontés pour valoriser et préserver les cultures des Tuamotu. J’ai également créé une association de protection du patrimoine de Tatakoto, Te marama o te tatou kaina Tatakoto, par le biais de laquelle nous essayons de faire bénéficier les habitants de certaines formations. L’idée est de développer l’économie de l’atoll dans le respect de son environnement. Par exemple, nous avons demandé des concessions pour permettre le collectage de bénitiers. Ceux-ci prolifèrent dans le lagon mais au rythme auquel ils sont ramassés, il n’y en aura plus dans 20 ans. Il y a encore beaucoup d’autres actions ciblées à mener, nous avançons pas à pas.

 

Comment définis-tu la culture ?

La culture est dans la diversité et dans l’adaptabilité. Ici, j’ai appris à vivre à l’image de la « capitale », de façon métissée, occidentalisée ; tandis qu’à Tatakoto, je me remets totalement dans le bain pa’umotu, sans exiger rien de plus.

 

Un dernier message ?

Je pense qu’il faut faire plus de communication pour responsabiliser la population à tous les niveaux de la société : culture, économie, éducation, santé, etc. Ceci pour donner la possibilité à chacun de vivre plus heureux.

 

N’y a-t-il pas de possibilité d’orienter encore plus cet article vers le festival des tuamotu ?

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