Le premier livre en tahitien a 200 ans !

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1810-2010 : il y a tout juste 2 siècles, le premier livre en tahitien était imprimé ! Que de chemin parcouru depuis sur la voie d’une littérature en langue tahitienne qui, si elle ne connaît pas encore un essor monumental, existe, se développe et continue de progresser.

Le premier livre d’une langue du Pacifique Sud, et notamment en reo ma’ohi, fut imprimé à Londres en 1810 par Towsend, Powell & Co. Il s’agissait d’un abécédaire : Te aebi no Taheiti, le b.a.-ba du tahitien, mis au point par John Davies, missionnaire protestant de la London Missionary*.

Jusqu’au début du 19ème siècle, la langue tahitienne n’était pas écrite. La première transcription en alphabet latin du reo ma’ohi a été proposée par Davies, le missionnaire qui est aussi à l’origine du premier dictionnaire tahitien-anglais, imprimé en 1851 à Tahiti. Celui-ci est toujours cité comme référence, bien que revu et corrigé à de nombreuses reprises.

L’éditeur Haere Po a édité en 1984 un fac-similé de cet ouvrage, réplique exacte de l’original qui est resté entre les mains des pasteurs Vernier pendant trois générations. Ce dictionnaire est un document exceptionnel sur l’état de la langue tahitienne au moment de son élaboration, à travers plus de 9 986 entrées. Yves Lemaître, linguiste à l’O.R.S.T.O.M, écrit au sujet du Davies : « Les lecteurs seront, sans nul doute, sensibles au pouvoir évocateur des pages du dictionnaire. (…) son auteur, ou mieux peut-être ses auteurs, avaient le goût de détails concrets. (…) ils ont eu la chance de pouvoir observer le Tahiti ancien des premières années du XIXe, au temps de Pomare I et de Pomare II, alors que les institutions, les techniques, les connaissances, la littérature, la religion… étaient encore celles de la culture tahitienne classique. Il n’est pas une page qui ne nous parle d’une cérémonie, ou d’une fête, d’une danse, de navigation et de navire, ou même d’un simple accessoire de pêche ou de cuisine, ou du nom d’une plante ou d’un poisson qui nous reste inconnu ». Le linguiste estime en effet que « plus de 60 % du vocabulaire présenté est inconnu des locuteurs actuels », mais, conclut-il, « les lecteurs de langue tahitienne pourront difficilement échapper à la fascination qu’exercent ces mots oubliés qui surgissent d’un passé prestigieux. »*

ENCADRE

La 1ère presse à Tahiti est arrivée en 1817

Et c’est le pasteur William Ellis qui l’a ramenée. La machine est installée à Moorea et plus précisément à Afareaitu. Le 30 juin 1817, les premières pages jamais imprimées en Polynésie sont tirées par le roi Pomare II en personne et il s’agissait… de l’abécédaire de John Davies ! L’évangile selon St Luc, traduit par Henri Nott, sera le 2ème document imprimé dans l’île. La plupart des Tahitiens qui apprirent à lire par la suite se servirent d’ailleurs des écrits religieux. La bible en tahitien (ancien et nouveau testament), Te bibilia moa ra, oia te faufaa tahito e te faufaa api, fut imprimée en 1838 à 3 000 exemplaires, mais à Londres.

* Source : BSEO n°213, « Les premiers documents imprimés en tahitien par la Société des Missions de Londres (1810 – 1834) ». Présenté et traduit par Henri Vernier.

* Source : BSEO n°229, « Le Davies ou 9 986 entrées ». Yves Lemaître.

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