Professeur de peinture, il dévoile la fonction cathartique de l’art

[singlepic id=16 w=320 h=240 mode=web20 float=left]Rencontre avec Jean-Charles Hyvert, artiste peintre, décorateur d’intérieur et nouvellement professeur d’histoire de l’art et de peinture au Centre des Métiers d’Art.

Il en va de la peinture comme des autres arts : ils ont tous peu ou prou, de près ou de loin, une fonction thérapeutique. Tout est question de pratique et d’implication. Jean-Charles Hyvert, artiste avant tout, dispense depuis quelques mois des cours d’histoire de l’art et de peinture au Centre des Métiers d’Art. Il les veut résolument non consensuels.

Comment se déroulent tes cours ?
Avant le cours de peinture, on fait toujours un cours d’histoire de l’art. J’aborde les artistes en fonction du thème que l’on va évoquer après. Je passe des diaporamas pour que ce soit visuel, sinon, ça ne parle pas. Le principe c’est d’éveiller la curiosité des élèves, de leur présenter des choses qu’ils n’ont jamais vues parce qu’ils ne sont pas forcément allés dans des musées, de leur ouvrir des portes qui vont exciter leur intérêt, leur inspiration. J’essaie de leur montrer à travers différents courants et diverses visions de peintres ce qu’a pu apporter telle ou telle technique. Ensuite, sur la base de la théorie, on passe à la pratique.

Et en pratique, comment ça se passe ?
Je leur donne un sujet, en général plutôt abstrait. L’idée c’est qu’ils s’expriment avec leurs tripes, qu’ils aillent chercher ce qui est enfoui au fond d’eux. On travaille avec peu de moyens : des bouts de carton, des pots de peinture en bâtiment… Mais ça importe peu : l’essentiel n’est pas la finalité, mais le processus pour y arriver. Le but n’est justement pas de faire des chefs d’œuvre mais de faire sortir ce qu’ils ont du mal à exprimer dans leur vie quotidienne, de débloquer des sentiments, des émotions, en allant creuser au plus profond. Sur le thème de l’expressionnisme par exemple, je les ai fait travailler sur la façon d’exprimer les sentiments entre deux êtres. La peinture est un bon médium pour retranscrire des choses qui sont parfois difficiles à mettre en mots.

Mais ce n’est pas forcément évident…
Non, mais je crois qu’un artiste doit être capable d’exprimer ses émotions. Le but n’est pas de faire du beau, du lisse, du consensuel, mais de faire du vrai. C’est en allant au bout de cette idée que l’on arrive à faire des œuvres qui présentent un intérêt et ils y parviennent. Il faut aller au bout des choses. La technique, ça ne suffit pas : il y a des bons techniciens qui font des peintures complètement creuses.

Ils arrivent à te suivre ?
Ils ont tous un potentiel qui ne demande qu’à s’exprimer. Ce cours, c’est justement leur donner la possibilité de se lâcher. C’est comme un jeu auquel ils se prêtent, malgré les difficultés, et je suis particulièrement touché par ceux que je vois « souffrir » pour arriver à faire sortir quelque chose. Cet atelier, c’est comme une thérapie qui nous libère de nos routines ; ce qu’on pourrait appeler littéralement une « re-création ». C’est un peu une introspection, qu’ils apprécient dans l’ensemble, même si certains se font vraiment violence. On arrive d’ailleurs en quelques cours à voir ceux qui ont des blocages, ceux qui ont un potentiel mais qui ne le développent pas complètement… Après il faut arriver à appuyer sur le bon bouton.

Ça n’arrive jamais qu’un élève essaie de biaiser en te faisait croire qu’il est allé au bout de lui-même alors qu’il est resté en surface ?
Si, mais je m’en rends compte tout de suite, parce que je suis passé par là aussi. On peut toujours donner le change. Ceux qui sont susceptibles de le faire sont d’ailleurs ceux qui ont plus de technique que les autres justement, et grâce à leur savoir-faire, ils essaient de tricher. Mais ici, on n’est pas là pour en jeter plein la vue mais pour montrer ce qu’on a dans le ventre.

C’est une nouvelle passion l’enseignement ?
À la base, je n’ai pas du tout la fibre pédagogique, mais ça se passe vraiment bien et je le fais avec beaucoup de plaisir. Je trouve ce cours très intéressant et c’est agréable car on commence à se connaître, à établir un rapport de confiance. Ça me motive beaucoup. C’est aussi enrichissant pour moi que pour eux finalement.

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Comment devenir professeur d’art ?
Éduquer l’œil, la main et l’esprit, tel est le rôle de l’enseignant d’art qui doit initier les élèves à la pratique artistique, tout en développant chez eux le sens esthétique autant que la créativité. Cours d’histoire de l’art, commentaires de tableaux, travaux pratiques, exercices à thème, sont autant d’occasions d’éveiller la sensibilité et d’aiguiser le sens critique, d’apporter les outils, les techniques et les moyens de réaliser des œuvres personnelles. La majorité des professeurs d’art exercent en collège ou en lycée. Certifiés ou agrégés, ils ont été recrutés sur concours et sont fonctionnaires. Les autres – en général employés par la municipalité – interviennent dans les écoles maternelles et élémentaires, dans les écoles d’art, voire en atelier.
Après le BAC > De trois à quatre ans d’études pour préparer une licence en arts plastiques ou appliqués ou un master, afin de se présenter aux concours de recrutement de l’Éducation nationale (CAPES, CAPET, agrégation). De trois à cinq ans en école d’art pour préparer les DNAT, DSAA, DNSEP, des diplômes appréciés dans le privé. Enseigner dans les écoles des beaux-arts, écoles d’arts appliqués, etc. exige de l’expérience.
Le CMA, beaucoup plus qu’un simple centre
Dans l’objectif de développer au maximum la créativité des apprentis du Centre des Métiers d’Art, Viri Taimana, son directeur, planifie régulièrement de nouveaux cours. Cela permet aux élèves d’enrichir leur vision de l’art et de ne pas s’enfermer dans un rôle d’artisan qui ne ferait que copier. Avec pour ambition de faire de l’établissement, plus qu’un simple centre, une école des beaux-arts, il leur offre une vision très éclectique de l’art et de ce qu’il peut leur apporter.
Infos pratiques
Centre des métiers d’art
Accueil ouvert du lundi au vendredi de 08h à 16h
Tél. : 43 70 51 /
Fax : 43 03 06
[email protected]

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